© Frederic Iovino
The Fairy Queen de Purcell à l’Atelier lyrique de Tourcoing

Songeries loufoques teintées d’humour british

par PAUL K’ROS
Publié le 3 mars 2022 à 19:28

Ça bruisse de partout à l’Atelier lyrique de Tourcoing qui multiplie avec bonheur et séduisante diversité les propositions artistiques lyriques. Ce soir c’est Alexis Kossenko qui est à la manœuvre avec son nouvel ensemble Les-Ambassadeurs-La Grande Écurie. L’objet de toutes leurs attentions est The Fairy Queen de Purcell, semi-opéra mêlant au chant des épisodes parlés et dansés créé au printemps 1692 au théâtre de la Reine à Londres, adapté librement du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare.

Réjouissante drôlerie

La version qui nous est offerte par le metteur en scène Jean-Philippe Desrousseaux pimente les féériques songeries shakespeariennes d’un burlesque humour british avec l’incursion hilarante de figures politiques britanniques contemporaines heureusement détournées de leur posture habituelle. C’est ainsi que l’on verra Margaret Thatcher danser la gigue avec une mâle frénésie cramponnée à son sac à main comme un marin au bastingage par grand vent (le danseur et chorégraphe Steven Player réussit un éblouissant numéro qui imprime à toute la pièce une réjouissante drôlerie), la reine Élisabeth (Chantal Cousin) engoncée dans un ensemble rose fuchsia se contente avec placidité de boire son thé tout en taquinant parfois Boris Johnson (Alain Buet) affalé au sol comme au sortir d’une Garden Party bien arrosée au 10 Downing Street par temps de Covid. Le reste est à l’avenant avec un prince Charles transformé en soldat de bois sur traineau à roulettes, sans compter un théâtre de marionnettes façon guignol ; une cabane de plage ou jardin faisant office de lieu d’aisances ou de fumette en douce… voilà le tableau ! Dans cet environnement particulièrement ludique, la musique de Purcell prend une saveur nouvelle sur scène comme dans la fosse avec bandes de violons et de hautbois, flutes, trompettes, clavecin, théorbe et viole de gambe, un régal augmenté d’une distribution vocale de choix, voix familières (du temps de Jean-Claude Malgoire), de Robert Getchell et Alain Buet que l’on retrouve toujours avec grand plaisir auxquelles se joignent celles de la soprano Rachel Redmond, de la mezzo Coline Dutilleul, du ténor Bénédict Hymas pour ne citer qu’eux, mais l’ensemble de la distribution est du même tabac. Une soirée à marquer d’une pierre blanche sur le chemin des aventures artistiques comme opposition humaine aux sombres grondements guerriers survenus le matin même.

Prochainement à l’atelier lyrique de Tourcoing : récital du ténor Michael Spyres le 5 mars ; opérette Là-Haut de Maurice Yvain le 6 mars. Billetterie : 03 20 70 66 66.