© Christophe Kwiatkowski
Les chroniques de JPM à La Chope

Rencontre avec Jean-Christophe Viseux, comédien, metteur en scène, un peu auteur

Publié le 3 mars 2022 à 19:23

Il arrive à La Chope, de la sciure sur son gilet. « J’aime bien bricoler » qu’il dit. Et puis il demande un Picon bière « parce que c’est amer et sucré en même temps ». De plus, il me demande des nouvelles de mon chien Günther. Pas de doute, c’est un mec bien. Jean-Christophe est né à Boulogne-sur-Mer, de parents instits, bercés par les idéaux de mai 68. « Petit, ma mère m’emmenait au centre de développement culturel voir des films, des spectacles. J’ai un souvenir du Saperleau de Gildas Bourdet. Le théâtre s’ouvrait, le spectacle finissait dans la rue. Je n’avais rien vu d’aussi étonnant. » Puis c’est la fac d’histoire à Lille, « ne sachant trop quoi faire. Je voulais découvrir le monde, et faire la révolution. J’ai été déçu. La révolution était déjà partie. » Objecteur de conscience, il rencontre la compagnie de rue Les aviateurs de Wazemmes avec qui il joue son premier rôle. C’est le déclic. « Je trouvais que la révolution sans le côté spectacle, c’était ennuyeux. Je trouvais que le spectacle sans la révolution l’était aussi. » À 22 ans, il arrête ses études, milite, vit de petits boulots et crée avec Marie Prète la compagnie La Vache Bleue. « On voulait faire des spectacles qui parlent aux gens qui ne vont pas au théâtre, un lieu qui leur paraît inaccessible. » Il avait une vison bien à lui de faire du théâtre, et surtout avec qui. « Il y a deux manières de faire du théâtre, soit en faisant des castings, soit tu grandis avec les gens et tu avances avec eux. Il y a l’idée de famille. Certains travaillent à la Vache Bleue depuis 15 ans. On se connaît très bien. On gagne un temps fou. » Regardant la sciure sur son gilet, il me semblait être un artisan du théâtre, où le savoir-faire vient d’une longue et fastidieuse pratique, et surtout, d’une liberté à se jouer des références, sans se soucier des modes. « Je suis bloqué aux années 70. Je peux voir Peur sur la ville et ne regarder que les vieilles bagnoles, les Simca, les Renault 16, voir des gens qui fument dans des bars, où l’on pense que la révolution est proche. Cette période dorée, c’est mon enfance. Dans ce métier, je crois que l’on mute aujourd’hui, comme un virus, pour l’adapter. Mais on peut toujours s’inventer des chemins de traverses, faire son propre parcours. » Son écriture s’inscrit dans cette logique, avec honnêteté et générosité. « J’accepte d’être surpris quand j’écris, sans savoir où je vais. Ma mère écrivait, mon frangin écrit, je ne me sentais pas légitime de le faire moi aussi, jusqu’au spectacle Le femme à la valise, un texte profondément imprégné de ma mère malade d’Alzheimer. » Il prépare actuellement Simca, quatre petites formes pour la rue autour de cette voiture mythique et qui sera au Festival de rue de Chalon cet été. La Vache Bleue, c’est bien d’autres spectacles, pour tout les âges, tous les publics, avec toujours cette volonté d’être là où les gens sont. Beaucoup de créations de la compagnie tournent actuellement. Allez sur son site. Je parie un Picon bière que vous trouverez ce que vous cherchez. Et Günther va bien, je vous remercie.

Pour en savoir plus : vache-bleue.org.