La Piscine voit la vie en grand

par Albert LAMMERTYN
Publié le 22 décembre 2018 à 15:09 Mise à jour le 4 janvier 2019

Rouvert le 20 octobre, le musée La Piscine, à Roubaix, offre une meilleure respiration à ses riches collections. Pas moins de cinq expositions en cours.

H. Di Rosa, « En pleine tronche, étape 7 : Binh-Duong, Vietnam », 1996. Laque, nacre, coquille d’œuf sur bois. Coll. particulière.
© ADAGP, Paris 2018. Photo : Pierre Schwartz

La nécessité s’imposait depuis un bail, il fallait agrandir. Le musée La Piscine l’a fait et bien fait. Il a rouvert le 20 octobre dernier après un an et demi de travaux, mais seulement six mois de fermeture (et encore, un programme délocalisé avait adouci le manque tout l’été). Hervé Di Rosa, Pablo Picasso et Alberto Giacometti sont les vedettes de cette réouverture, que complètent deux autres expositions. Déjà architecte de la mutation du lieu en 2001, Jean-Paul Philippon met ici en harmonie l’historique et le contemporain. Les espaces sont hauts. La lumière naturelle y fait son nid. Côté collections, un bol d’air pour l’art et les trésors du musée roubaisien. Côté public, de l’espace supplémentaire pour mieux voyager dans un ensemble comprenant du neuf (seconde salle d’exposition, panorama de la sculpture moderne, évocation de l’histoire de la ville), une galerie dédiée aux artistes du Groupe de Roubaix. Le programme des ateliers de pratiques artistiques s’est étoffé lui aussi.
Dès 1902, le Musée national de Roubaix affirmait son intérêt pour la sculpture. Le nouveau parcours navigue parmi des œuvres importantes de Bourdelle, Maillol, Bartholomé, Meunier, Csaky, Lipchitz, Orloff, Despiau, Marini, Laurens, Giacometti, Rodin, Picasso, etc. Quant à l’atelier d’Henri Bouchard (1875-1960), intégralement transféré de son site parisien d’origine en 2007, c’est le seul atelier conservé de cette génération et de cette ampleur.
Un mot sur la valorisation de la céramique, une des originalités des collections de La Piscine. Sa place dans la grande nef du bassin, passage obligé entre le bassin et les nouvelles ailes du musée, lui accorde désormais une visibilité primordiale.

« L’œuvre au monde » du polymorphe Hervé Di Rosa

Parmi les trois expositions de la renaissance du musée, celle qui est consacrée à Hervé Di Rosa est la plus « exotique ». C’est que son goût du voyage est contagieux et gagne le public. En juin 1981, Bernard Lamarche-Vadel offrait les murs de son loft avant déménagement à huit jeunes peintres, parmi lesquels Hervé Di Rosa. L’été de cette année-là, pour l’exposition 2 Sétois à Nice, Ben, alias Ben Vautier, en invitait deux dans sa galerie de Nice : Robert Combas et encore Di Rosa.

Pablo Picasso, « Homme au mouton », 24 octobre, 1952. Crayon noir gras et lavis sur papier vélin fin, Paris, musée national Picasso–Paris.
© Succession Picasso 2018 - Photo © RMN-Grand Palais (Musée nat. Picasso-Paris) / Thierry Le Mage

Autre exposition en cours, Picasso : L’Homme au mouton propose notamment une lecture contextualisée d’une œuvre emblématique de l’histoire de la sculpture moderne. Elle associe aux créations de Pablo Picasso des œuvres d’autres artistes et « un appareil documentaire fort », souligne Bruno Gaudichon, directeur de La Piscine. L’importance de la sculpture dans l’itinéraire de Picasso est illustrée par la célèbre toile Le Sculpteur (1931) à laquelle est confrontée la Tête de l’homme au nez cassé d’Auguste Rodin. Une série de photographies évoque l’exposition Arno Breker, organisée par Vichy et l’occupant allemand, à Paris, au printemps 1942 et qui semble, émotionnellement, être le point de départ de la réalisation de L’Homme au mouton.
La présentation Giacometti, portrait d’un héros, hommage à Rol-Tanguy, réunissant sculptures (en plâtre et en bronze), dessins et photographies, évoque le héros de la Résistance.
Absent des collections roubaisiennes et jamais exposé à La Piscine, Alberto Giacometti (1901-1966) constitue une figure centrale de la saison de réouverture du musée roubaisien. Un exemplaire en bronze du saisissant Buste de Diane Bataille, conçu vers 1947, introduit magistralement la section consacrée au portrait sculpté au XXe siècle, en regard d’œuvres de Bourdelle et de Rodin.

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> Site externe :
Promenade en images dans le musée agrandi. © Albert Lammertyn