CARGILL

Le combat des Cargill part sur le terrain judiciaire

Dialogue impossible

par Philippe Allienne
Publié le 17 janvier 2020 à 15:50 Mise à jour le 18 janvier 2020

Depuis l’annonce, le 21 novembre, du projet de restructuration de l’entreprise Cargill, à Haubourdin, et la suppression de 183 postes, les salariés ne baissent pas la garde. Les élus du Comité social et économique (CSE, à majorité CGT) ont décidé de faire appel à un cabinet d’expertise et à l’avocat parisien Fiodor Rilov. Objectif : rechercher les véritables explications au plan patronal et, dans un premier temps, le faire suspendre.

Ambiance tendue, vendredi 10 janvier, dans la salle du restaurant d’entreprise de Cargill. C’est là que se tenait une assemblée générale, à la suite d’une réunion de préparation du plan de sauvegarde de l’emploi (la troisième) réunie la veille entre représentants patronaux et syndicaux. Comme les précédentes, affirme la CGT, ce plan n’a abouti sur rien et n’a répondu à aucune question des salariés.

Pour cette AG, les délégués CGT avaient invité l’avocat Fiodor Rilov et Jean-Vincent Koster du cabinet Progexa. Autour d’eux, plusieurs soutiens à leur lutte : Ludovic Bouvier, de l’Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT , Pascal Blindal, de l’Union départementale CGT, Ali Benirba (cheminots CGT), Isabelle Bosseman (Centre hospitalier universitaire), etc.

Tensions et menaces

Dans la salle étaient aussi présents deux représentants de la direction, Christophe Plessis et Philippe Capaces, manager de transition et consultant en stratégie chargé de la mise en œuvre du projet de réorganisation (passage du maïs au blé pour la fabrication de l’amidon, suppression des 183 postes, suppression de l’actuel bâtiment d’amidonnerie). Au fur et à mesure des interventions et témoignages de soutien, la tension est montée.

La colère s’est notamment cristallisée sur Philippe Capaces qui avait le matin même tenté de gêner la tenue de l’AG (en conditionnant la présence des agents de maintenance au non paiement de leurs heures). Mais surtout, il avait convoqué le secrétaire de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) et titulaire du CSE.

Ce dernier, qui avait reçu une lettre recommandée le 24 décembre, s’est vu reprocher d’avoir diffamé le directeur pour l’avoir qualifié de « liquidateur » , un terme qu’il maintient. Les deux membres de la direction ont été contraints de quitter l’AG, ainsi que le responsable du service maintenance.

Piquet de grève

Surtout, quand les débats ont porté sur la nécessité de rechercher l’unité, les membres de la CFDT ont choisi de sortir. Quelques jours plus tard, la direction a choisi de traiter exclusivement avec cette organisation syndicale et avec la CFE-CGC, empêchant les membres de la CGT d’entrer dans l’usine. Ces derniers comptent porter plainte pour délit d’entrave.

À ce point du non dialogue, la CGT a organisé un piquet de grève à partir du mardi, recevant le soutien du sénateur communiste Éric Bocquet, de salariés de l’usine Roquette et de salariés du siège de Cargill France, à la Défense. Les usines Cargill de Redon (Ille-et- Vilaine) et de Baupte (Manche) ont également apporté leur solidarité en débrayant. « Même Barnabé Mark, du comité d’entreprise européen de Cargill, pourtant carté CFDT, nous soutient et assure ne pas comprendre ses collègues » , assure Dorian Valois, représentant CGT du site d’Haubourdin.

De son côté, la direction affirme avancer dans ses propositions, notamment en ce qui concerne les indemnités de départ. Sauf que personne, à ce jour, ne sait qui exactement sera concerné et quelles seront les modalités. Il reste à l’avocat du CSE d’obtenir un maximum d’informations sur ce qui se trame vraiment autour du site haubourdinois.