VALENCIENNOIS

Ascoval : 281 emplois sauvés

par Mathieu Hébert
Publié le 19 décembre 2018 à 16:04

Le tribunal de grande instance de Strasbourg a rendu son jugement le 19 décembre : Ascoval, l’aciérie créée par Vallourec en 1975, rejoint le giron du jeune groupe industriel Altifort.

C’était attendu. C’est confirmé : Altifort devient l’actionnaire d’Ascoval, avec prise d’effet le 1er février 2019. La justice a validé mercredi 19 décembre la reprise de l’aciérie Ascoval de Saint-Saulve par le groupe industriel Altifort, dont le siège est à Ham (Somme). Cette décision a été rendue une semaine après la présentation, le 12 décembre, de l’offre de reprise du seul repreneur encore en lice devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg.

Le projet d’Altifort consiste à maintenir et développer la production d’aciers spéciaux à destination de l’industrie. Jeune groupe industriel franco-belge spécialisé dans la mise en œuvre de matériaux spéciaux (aciers spéciaux, titane, aluminium, etc.), il vise des applications de pointe (automobile, militaires, nucléaires, navales, spatiales, etc.)

Altifort confirme son intention d’investir 85 millions d’euros dans la création d’un train à fil. Cet outil de laminage transformera les barres d’acier en « fil machine » sur le site d’Ascoval pour servir un marché et des clients en aciers spéciaux. Ce nouvel outil industriel ne verra le jour qu’à partir de janvier 2021. « Nous devons prendre le temps de bien examiner le marché et les attentes des clients », explique Cédric Orban président d’Ascoval. Parmi les marchés envisagés : les tréfileries, notamment celles du groupe Altifort, ainsi que les industriels des secteurs de l’automobile, de la défense ou du médical.

L’aciérie de Saint-Saulve emploie 281 personnes.

« Cette solution de reprise préserve non seulement les 281 emplois d’Ascoval, les 1 000 emplois indirects au niveau de la région, mais devrait en créer 140 nouveaux en 2 ans sur le site de Saint-Saulve », souligne Ascoval dans un communiqué publié peu après la décision du tribunal.

Aucune banque française ne s’est mouillée

Le financement du plan de reprise s’appuie sur un total de 152 millions d’euros, dont 85 financeront le train à fil. Les fonds privés représentent 105 millions d’euros (dont 35 millions d’euros de fonds propres d’Altifort). L’Etat apporte 25 millions d’euros, la Région Hauts-de-France 12 et Valenciennes métropole 10. Aucune banque française n’a apporté son concours.

La nouvelle a été accueillie avec soulagement à Saint-Saulve, où les représentants syndicaux ont appris la décision du tribunal par les journalistes présents sur place, rapporte une consœur de France Bleu Nord.

Très investi dans le projet de reprise par Altifort, le dirigeant d’Ascoval Cédric Orban a multiplié les remerciements, pour Altifort d’abord, «  qui a gardé le cap avec un projet solide et ambitieux pour Ascoval bien que les obstacles furent nombreux  », allusion au «  torpillage » du projet par Vallourec, comme s’en sont plaint plusieurs acteurs nordistes. Il a également salué les « efforts considérables » du personnel pour améliorer la compétitivité du site, ainsi que l’engagement des investisseurs privés et publics. « Nous savons maintenant que nous pouvons réaliser des choses extraordinaires tous ensemble et je suis confiant pour l’avenir. »

Xavier Bertrand, président (divers droite) de la Région Hauts-de-France, a salué le « courage » des salariés et se félicite que « la mobilisation collective a payé : Ascoval est sauvée ». « Enfin une bonne nouvelle pour notre industrie et l’emploi après tant et tant de mobilisations ! Bravo aux salariés et à leurs organisations syndicales et bon succès au projet du repreneur », a réagi Fabien Roussel, député du Valenciennois et secrétaire national du PCF.

Les élus du Valenciennois (droite et gauche) avec les salariés, à Saint-Saulve.

« C’est une victoire utile pour l’indispensable reconquête industrielle dans notre pays », estime la sénatrice PCF Michelle Gréaume, également élue du Valenciennois. « L’industrie doit occuper une place centrale dans la relance économique et sociale du pays. Une industrie moderne qui intègre les préoccupations environnementales, sociales, le respect des territoires et des hommes. Cela implique de s’affranchir des contraintes de l’unique rentabilité financière et de développer une politique publique forte et volontariste autour d’un Etat qui doit redevenir stratège et visionnaire. »

« Le large rassemblement qui s’est opéré a permis cette grande et belle victoire, l’union fait la force ! », observe Fabien Thiémé, maire (PCF) de Marly, à l’initiative d’une collecte de soutien qui aura permis de recueillir plus de mille euros pour les salariés en lutte.

Vallourec, qui avait fondé cette aciérie en 1975, en avait cédé une partie du capital à Asco Industries en janvier 2017 mais en était devenu le seul actionnaire et principal client après la liquidation d’Asco industries. L’aciérie était en redressement judiciaire depuis janvier 2018. L’horizon s’était éclairci fin octobre, quand le ministre de l’Economie Bruno Le Maire avait jugé « solide » et « crédible » le projet de reprise présenté par Altifort, malgré l’absence de soutien de Vallourec, comme le souhaitait initialement le repreneur. L’aciérie doit trouver de nouveaux clients pour pallier le départ de Vallourec. « Beaucoup de clients ont manifesté leur intérêt », avance Bart Gruyaert, co-fondateur et directeur général d’Altifort.