Bridgestone-Béthune

Les souhaits et craintes de la sénatrice Cathy Apourceau-Poly

Publié le 8 janvier 2021 à 14:33

La sénatrice du Pas-de-Calais se rappelle au bon souvenir de la ministre chargée de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher. Dans un courrier daté du 5 janvier, elle insiste sur son souhait d’une reprise de l’usine Brigestone Béthune par un fabricant de pneumatiques. Voici l’essentiel du texte [1] :

« En ce début d’année, l’avenir du site Bridgestone et de ses salariés entre dans une phase décisive. Le délai pour négocier le PSE se réduit, et les salariés sont préoccupés, en tout premier lieu, par le montant de la prime supra-légale qu’ils pourront obtenir. C’est une phase délicate, et nous sommes contraints de nous contenter d’apporter un appui, qui pourra sembler formel, aux employés de Bridgestone Béthune. Je souhaite sincèrement que Madame la Ministre du Travail puisse encore agir auprès de la direction du Groupe, mais faute d’une volonté d’agir sur l’homologation du PSE, j’en doute. Le contenu des accords dépendra de la capacité de mobilisation des salariés, pour faire pression sur la multinationale, et de l’enveloppe déjà provisionnée par celle-ci.

Neuf candidats potentiels

Mais c’est le devenir du site industriel qui m’amène à vous interpeler de nouveau. Au nom du sacro-saint « secret des affaires », qui se dissimule pudiquement derrière les « clauses de confidentialité », les élus de la République, comme les salariés en sont réduits à devoir faire confiance, dans la recherche d’un repreneur, à l’entreprise qui a choisi la fermeture ; et à l’État, qui ne l’a pas vu venir à temps ! C’est un simple constat, sans esprit polémique de ma part. C’est pourquoi, je tiens à préciser aujourd’hui, ma réflexion sur ce sujet. Je souhaite que le site puisse être repris par un fabricant de pneumatiques. BPI Groupe et Business France ont enregistré jusqu’à 9 candidats potentiels, qui ont manifesté une expression d’intérêt. Deux (les projets 9 et 12 selon le classement de BPI Groupe), un projet chinois, et un indien, font l’objet d’échanges approfondis. Je partage l’avis exprimé par le cabinet Syndex, à l’occasion de la réunion à laquelle vous participiez le 21 décembre dernier à Béthune : « ce sont les projets les plus intéressants, en terme d’emplois, d’adaptabilité des salariés, et d’occupation du site ». Même si ce sont les moins avancés. L’insistance de Bridgestone, dès l’annonce de la fermeture en septembre dernier, à affirmer qu’il croyait en la possibilité d’une reprise par un pneumaticien, qu’il était prêt à céder l’usine à un concurrent, me conforte dans l’idée que c’est la piste sérieuse à explorer jusqu’au bout !

Opacité

Bridgestone a aussi annoncé en octobre, qu’il renonçait à la fabrication des pneus de petite dimension en Europe, « libérant » ainsi une production de plus de 5 millions de pneumatiques par an, pour un éventuel repreneur, intéressé par la porte d’entrée que représente l’usine de Béthune, sur un marché européen en passe de se fermer aux importations, à l’instar du marché américain. J’ai deux inquiétudes dont je tiens à vous faire part :

  • Celle d’un rejet de ces projets, faute du temps nécessaire pour les concrétiser.
  • Celle d’un rejet de ces projets, pour des raisons étrangères à leur qualité intrinsèque : pression des autres fabricants européens ; choix politiques d’une fermeture anticipée du marché européen, à des constructeurs, souvent originaires de pays, peu « en cour ». J’ai bien pris note de votre réponse concernant mes interrogations sur l’appréciation de Michelin... L’impossibilité dans laquelle, élus et représentants du personnel sont mis, de pouvoir apprécier, la validité ou pas des projets en question, renforce mes craintes. À l’heure où, pour tout et n’importe quoi, on consulte des Comités citoyens de suivi, je ne peux que regretter l’opacité qui préside aux décisions économiques : la démocratie a encore de grands pas à faire. Quant aux autres projets, qui semblent avoir les faveurs, tantôt de l’un, tantôt de l’autre... ils ont le mérite d’exister. Ce n’est pas la place qui manque dans le Béthunois pour les accueillir. Mais aucun ne peut prétendre développer un réseau de sous-traitance et d’activités connexes, comme celui d’un fabricant de pneumatiques. Le site de Bridgestone ne me semble pas avoir vocation à accueillir des activités multiples, qui le démantèleraient comme grand site industriel. »

Notes :

[1Les intertitres sont de la rédaction.