Mazingarbe

Maxam Tan fait capoter la reprise du site et de ses 73 salariés

par Philippe Allienne
Publié le 11 décembre 2020 à 12:33

Le géant européen d’explosif Titanobel, qui possède un dépôt de stockage à Ostricourt (59), devrait reprendre l’usine d’ammonitrate Maxam Tan de Mazingarbe, près de Lens. Cette dernière, spécialisée dans la fabrication d’ammoniac et de nitrate d’ammonium, avait été placée en redressement judiciaire le 26 octobre par le tribunal de commerce de Lille métropole. Elle recherchait un repreneur depuis de longs mois et le tribunal avait fixé la date limite, pour les offres, au 25 novembre. La reprise, avec les 73 salariés de Maxam Tan, devait être effective fin décembre, ou courant janvier au plus tard. Mais coup de théâtre, alors que le projet de reprise semblait finalisé, Titanobel a retiré son offre le 3 décembre. Selon Alain Griset, ministre délégué aux PME, le groupe Maxam lui a refusé d’assurer un flux de commandes afin de lui laisser le temps de s’assurer une clientèle.

Atténuer le choc social et environnemental

La sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly veut encore croire à une possibilité de reprise et a écrit à la ministre déléguée à l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, pour faire revenir Titanobel à la table des négociations. Elle a également écrit, avec le maire de Mazingarbe, Laurent Poissant, au président de Maxam Europe SA, José Fernando Sanchez-Junco Mans. Ils lui demandent, à lui aussi, de reconsidérer sa position en lui rappelant le contexte local qui voit se multiplier les fermetures d’entreprises. « Que vous fassiez le choix de vous désengager de ce site, soit ! Mais nous en appelons à votre sens des responsabilités pour que cela se fasse sans dégâts sociaux et environnementaux  », plaident-ils. Les deux signataires demandent au dirigeant ce qu’il compte faire pour atténuer le choc social et environnemental en cas de liquidation. « La solution la meilleure pour les familles, estiment-ils, serait la reprise par une entreprise sérieuse, qui puisse assurer la pérennité du site et de ses emplois. (…) Les demandes du groupe Titanobel sont-elles à ce point non négociables ? » La date limite est fixée au 16 décembre. De son côté, le gouvernement, comme il l’avait fait pour le producteur de pneumatiques Bridgestone, se dit prêt « à mobiliser le levier du plan de relance, qui prévoit 35 millions d’euros pour l’industrie française, par une avance remboursable ou une aide directe ». Il ajoute que cela « pourrait se faire en collaboration avec d’autres acteurs du territoire comme la communauté d’agglomération ou la Région ».

Salariés dubitatifs

Cette solution est toutefois assortie d’une condition : que le projet du repreneur corresponde aux critères de ce plan de relance : innovation, transition écologique, etc. Les salariés se montrent dubitatifs et préfèrent parler du montant des indemnités de licenciement au-delà du minimum légal. L’usine de Mazingarbe était davantage connue sous son ancien nom de « Grande paroisse ». Le site chimique avait été créé en 1897 et appartenait au groupe Total avant d’être repris en 2011 par le groupe espagnol Maxam détenu par un fonds de pension américain. Le site est classé « Seveso 2 » en raison du type de sa production. Le nitrate d’ammonium, utilisé pour les engrais et les explosifs civils, est en effet une matière dangereuse. C’est ce produit qui est à l’origine de la catastrophe du port de Beyrouth en août dernier. C’est lui aussi qui est la cause de la catastrophe qui a causé la mort de 31 personnes lors de l’explosion de l’usine AZF, à Toulouse, le 21 décembre 2001. Comme il est impossible de créer ex-nihilo un nouveau site Seveso, le groupe Titanobel trouvait donc une opportunité en reprenant l’usine du Pas-de-Calais.

(Photo : © Google Maps)