TERNOIS

Nestlé s’apprête à vendre le charcutier Herta

par Mathieu Hébert
Publié le 21 février 2019 à 15:41

Le géant de l’agro-alimentaire s’apprête à se séparer de ses activités de charcuterie. L’usine Herta de Saint-Pol-sur-Ternoise devrait être vendue.

« Nestlé n’a plus d’appétit pour la charcuterie  », titrait le journal Les Echos, en fin de semaine dernière. Officiellement, le géant suisse a décidé « d’explorer diverses pistes stratégiques pour cette activité de charcuterie, y compris une éventuelle cession ».

La rumeur, évoquée il y a six mois à Saint-Pol-sur-Ternoise, devient concrète pour les quelque 1200 personnes qui travaillent dans la plus grande usine de la marque en France. « Quand on avait posé la question en juin 2018 à notre PDG, on nous avait répondu que ce n’était pas à l’ordre du jour », rapporte David Dubois (FO). Le 14 février dernier à 7 h du matin, le syndicaliste recevait un coup de fil du même PDG confirmant le projet de cession. « Depuis 1995, j’entends que Nestlé se désengagerait  », glisse Claude Laurent (CGT), peu surpris.

« Toutes les options sont ouvertes », indique-t-on au siège de Nestlé France. En interne, la direction de l’usine indique que le site n’est pas à vendre, qu’il ne s’agit que d’une « réflexion ». Pour la CGT et FO, l’affaire est entendue : « l’usine est à vendre », résume David Dubois.

De source syndicale, le géant de l’alimentaire conserverait dans son portefeuille les usines Herta spécialisées dans les pâtes (Suisse) et autres produits végétaux (steaks de soja en République tchèque), mais se désengageraient des productions à base de viande, qui sont le cœur de l’activité du site du Pas-de-Calais (jambon, knacki, lardons...) d’Illkirch, en Alsace, où environ 400 personnes produisent de plus petites séries.

« Ça nécessite une main d’œuvre importante »

« Le choc est violent, mais il ne faut pas forcément stresser les gens. 2018 a été une très bonne année pour Herta. On n’a pas de difficultés financières ; c’est juste que notre actionnaire ne veut plus de nous », relativise David Dubois. Le site a concentré plusieurs investissements d’ampleur ces quatre dernières années, sur les lignes de cuisson ou à l’encartonnage par exemple. « L’usine est performante : il y aura des repreneurs », veut croire le syndicaliste. « Que ce soit Nestlé ou un autre... Nous, on ne se bat pas pour les capitalistes, mais pour l’emploi », lâche Claude Laurent. A Saint-Pol, on n’attend pas de précision avant plusieurs mois.

Le site Herta de Saint-Pol-sur-Ternoise, dans le Pas-de-Calais, est la plus grande usine de la marque en France.

Cela se fera-t-il sans casse ? « La charcuterie, ça nécessite une main d’œuvre importante », souligne David Dubois. Mais Nestlé envisagerait-il de dégraisser au maximum avant de céder ses actifs, pour les rendre plus profitables ? Chez Herta, on regarde du côté d’autres marques du groupe. Par exemple chez Purina, spécialiste de l’alimentation animale : des emplois sont supprimés sur le site de Marconnelle, près d’Hesdin. En Bretagne, c’est un site complet qui pourrait fermer.

Cathy Apourceau-Poly (PCF) en appelle à l’Etat

Les investissements réalisés, les carnets de commande bien remplis, permettent d’être raisonnablement optimiste sur les perspectives de reprise, au cas ou Nestlé pousserait jusqu’au bout sa nouvelle orientation stratégique, estime la sénatrice du Pas-de-Calais Cathy Apourceau-Poly.

Mais l’élue communiste prend les devants : la qualité du repreneur et de son projet industriel seront essentiels pour préserver les emplois et le dynamisme économique du site. C’est précisément le rôle du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI). D’où la question adressée par la sénatrice au ministre de l’Economie le 18 février : « Quel suivi l’Etat met-il en œuvre sur ce dossier ? Comment s’assurer qu’une éventuelle reprise ne s’accompagnera pas de suppressions d’emplois ?  »