SERVICES PUBLICS

Aux impôts, on prélève aussi les emplois à la source

par Mathieu Hébert
Publié le 10 janvier 2019 à 15:39

Avec la mise en place du prélèvement à la source, la suppression de milliers de postes dans l’administration fiscales n’est pas sans poser problème.

« Ne quittez pas, je vous passe mon collègue ». Le 2 janvier dans un centre des impôts à Amiens, Gérald Darmanin s’est fait téléconseiller devant les caméras et les micros. Et le ministre des Comptes publics de répéter inlassablement le même message : la mise en place du prélèvement à la source est souhaitée par une majorité de contribuables français, et se déroule sans anicroche.

Gérald Darmanin répond aux contribuables devant les caméras, à Amiens le 2 janvier. (Twitter /gdarmanin)

Pas de bug, dit le ministre nordiste qui, après Amiens, visitait le centre des impôts de Lille et l’école des douanes de Tourcoing ce jeudi 10 janvier.

Pour le bilan technique de la réforme, on en jugera en fin de mois, quand l’impôt sur le revenu sera automatiquement prélevé sur les salaires et pensions de retraites. « Avec le prélèvement à la source, votre impôt s’adapte immédiatement à l’évolution de vos revenus », écrit Gérald Darmanin, dans une lettre adressée aux contribuables en début d’année.

Il s’adapte aux revenus, mais les ampute chaque mois, et non plus une fois par an. « Quand mes salariés vont voir qu’ils perdent plusieurs dizaines d’euros chaque mois, ils vont faire la tête », anticipe un petit patron du Dunkerquois. Sans impôt supplémentaire, mais avec un prélèvement régulier, l’effet psychologique a déjà freiné les gouvernements précédents. On le mesurera ces prochains mois, alors que la question du pouvoir d’achat prend de plus en plus d’ampleur.

30 000 suppressions en dix ans

De l’autre côté du guichet enfin, c’est chez les agents des Finances publiques (DGFiP) que ça coince. Ce n’est pas nouveau : en quelques années, c’est un plan social qui ne dit pas son nom qui a touché cette administration. « 2150 suppressions d’emplois supplémentaires sont prévues en 2019, après les 30 000 que nous avons connus en dix ans », alerte la CGT Finances publiques.

« Le PAS (prélèvement à la source) est une réforme lourde, la DGFiP est fragilisée, cependant le gouvernement poursuit sa politique destructrice et en s’apprêtant à remettre profondément en cause l’organisation de la DGFiP », analyse Solidaires Finances Publiques.

Rappelons-le : l’administration fiscale est chargée du recouvrement de l’impôt, mais aussi du contrôle fiscal, de la lutte contre la fraude… A cet égard, les mesures du gouvernement actuel se situent dans la même lignée que ceux de Nicolas Sarkozy ou François Hollande, déplore la CGT : « des missions et des conditions de vie au travail qui ne cessent de se dégrader ; une "géographie revisitée" qui aboutira à des restructurations massives, la diminution continue du budget de fonctionnement… »

Nord : une cinquantaine de services sur la sellette

Une quarantaine de trésoreries est menacée de fermeture d’ici 2022 dans le département du Nord, selon la CGT Finances publiques, qui évoquait en novembre un projet transmis par la direction régionale au ministère. Le projet porterait sur quarante-deux trésoreries, ainsi que quatre services des impôts des particuliers (SIP), neuf services des impôts des entreprises (SIE), et six services de publicité foncière. Leurs implantations sont réparties sur tout le département. « C’est un démantèlement complet du réseau de notre administration qui est prévu », avance la CGT.