En tête des revendications des sapeurs-pompiers professionnels : les effectifs. Le 2 juillet, le conseil d’administration du Sdis 59 doit voter le Schéma départemental d’analyse et couverture des risques (Sdac). « L’analyse, explique Laurent Cauterman, c’est la photo du département qui révèle l’ensemble des risques courants, particuliers, séveso, etc. À partir de là, on met en place la couverture pour être apte à y répondre en termes de moyens humains et matériels. » Lors du comité technique auquel participent les organisations syndicales [1] et les élus politiques, les élus ont rendu un avis positif pour le Sdac. Mais les syndicats se sont abstenus. « Nous n’avons rien à reprocher à l’analyse, qui est pointue, mais sur les moyens, c’est autre chose. » En fait, les pompiers refusent de signer un chèque en blanc en votant pour un document qui sous-estime les moyens humains.
Il manque 40 pompiers
En 2012, le Service départemental d’incendie et de secours (Sdis 59), alors présidé par Jean-Claude Magnier, comptait 2 182 sapeurs-pompiers professionnels, dont 1 718 opérationnels (les pompiers qui vont sur le terrain). Depuis, ces chiffres ne cessent de diminuer pour atteindre, en 2020, l’objectif de 2 146 hommes, dont 1 682 opérationnels en centres de secours. C’est le chiffre auquel entend se tenir l’actuel président du Sdis, Jean-René Lecerf, par ailleurs président du Département.Pour la CGT, le compte n’y est pas. Il manque au moins une quarantaine d’opérationnels. Et le syndicat ne comprend pas. En 2019, le budget de fonctionnement apparaît excédentaire (5,7 millions d’euros). Il s’élevait à 3,8 M€ un an plus tôt. Si l’on embauchait immédiatement les 40 pompiers nécessaires, le coût sur les six mois qui restent de l’exercice serait de 750 000 euros (soit 37 500 euros par recrutement). Au lieu d’embaucher, regrette Laurent Cauterman, le Sdis préfère travailler en « mode dégradé » : là où il faudrait une équipe de six personnes par véhicule d’intervention, ils ne sont que trois ou quatre. Sur les grosses opérations, on fait appel à un véhicule d’une autre caserne. Sauf que le délai d’arrivée sur un sinistre est de 15 minutes. Quand un véhicule vient d’une autre caserne, il lui en faut le double. Autre sujet qui fâche les soldats du feu : le traitement de la Covid. 250 pompiers ont été contaminés sur les deux mois. Cela a bien sûr eu des impacts sur les effectifs, qui se sont particulièrement faits ressentir dans les petites casernes de moins de dix personnes (comme en Avesnois). Mais surtout, les pompiers ont manqué de masques et de combinaisons de protection. « Nous avions des stocks datant de l’épidémie de H1N1, mais ils ont fondu en une semaine ! », dit Hugues Tétaert, membre du CHSCT du Sdis 59. Lui-même a été testé positif. « Nous avons sans doute été nous-mêmes sources de contamination », craint-il. « Aujourd’hui, on glorifie notre professionnalisme et notre dévouement. Ce que nous voulons c’est une vraie reconnaissance. Et puis nous pensons à une seconde vague possible en espérant que les leçon ont été tirées. » En attendant, la prime Covid, ce n’est pas pour les pompiers. Jacques Houssin, le vice-président du Sdis, l’a confirmé. La prime de feu, actuellement de 19 %, passerait à 25 % avant le 1er juillet. C’était une promesse du ministre de l’Intérieur Castaner qui renvoie la patate chaude aux Départements. De toute façon, les pompiers réclament 28 %.Ce n’est pas tout. « Nous voulons aussi un dispositif spécifique pour le lavage de nos tenues, comme cela se fait à l’hôpital », précise Hugues Tétaert. Jusqu’à présent, les pompiers nettoient leurs tenues chez eux. Or, après une opération incendie, elles portent des particules cancérigènes (CMR) qui restent dans le lave-linge familial et peuvent se transmettre. Dans le Nord, les pompiers ont obtenu un investissement de 1,2 million d’euros pour l’achat de 113 lave- linges classiques. Ils devront laver eux- mêmes leurs tenues en caserne sans que cela élimine les risques.Chez les pompiers en retraite, on décèle cinq fois plus de cancers résultant d’une exposition aux fumées.