Services publics

Démétropolisation des Finances publiques : une opération de communication

Publié le 7 février 2020 à 11:49 Mise à jour le 3 mai 2021

Avant de partir en campagne pour les élections municipales, le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, feint d’offrir un joli cadeau aux collectivités. Dans un long communiqué décliné en fonction des départements concernés, son ministère annonce les communes retenues pour accueillir un service des Finances publiques. « Une opération de communication » qui sert à masquer la logique comptable du gouvernement, dénonce la CGT

Le 17 octobre dernier, rappelle le ministère de l’Action et des Comptes publics, « un appel à candidatures avait été lancé auprès des collectivités locales qui souhaitent accueillir des services de la Direction générale des finances publiques (DGFIP) actuellement situés en Île-de-France et dans les grandes métropoles. 408 collectivités, présentes dans 84 départements et représentatives de nos territoires, ont répondu à cet appel ».

Cinq communes en Hauts-de-France

L’ examen des dossiers a été confié à un comité interministériel qui les a étudiés au regard de critères portant sur « la situation sociale et économique du territoire, son attractivité, la qualité des solutions immobilières proposées et les conditions d’accueil des agents des Finances publiques ». C’est donc sur ces critères que le comité a retenu une première liste de 50 communes pour déconcentrer ses services, parmi lesquelles Béthune et Lens dans le Pas-de-Calais, Denain dans le Nord, Château-Thierry et Laon dans l’Aisne. Une autre sélection sera effectuée d’ici avril. Si l’on s’en tient aux critères, « on peut aisément comprendre les candidatures des collectivités qu ont intérêt à accueillir de nouvelles activités. Du reste, nous ne sommes pas contre la démétropolisation en tant que telle », concède Yannick Massiet , responsable CGT à a direction des Finances publiques du Nord. Cela peut aussi arranger les agents qui peinent à se loger dans les grandes métropoles ou qui passent beaucoup trop de temps dans les transports. « Mais à supposer que des agents de Bercy acceptent de venir à Denain, ils auront une mission supra départementale et cela ne règlera en rien les problèmes des usagers. » Quant aux agents de Lille (une des métropoles visées par la déconcentration des services), ils préfèreront certainement être nommés dans le Douaisis (50 d’entre eux sont douaisiens) ou dans une commune dont ils sont originaires. Mais le plan n’est pas adapté de la sorte.

79 suppressions de postes dans le Nord

Reste l’intérêt financier pour le ministère de tutelle. Le mètre carré à Denain est nettement inférieur au m2 parisien. Mais, résume Yannick Massiet, « la démétropolisation n’est jamais que le second volet du plan Darmanin contre lequel nous nous battons. Le premier étant la restructuration ». Dans le Nord, on est passé de 4 200 agents il y a 13 ans à 2 900 aujourd’hui. Dans le courant de l’année, 79 autres postes vont sauter. Olivier Villois, secrétaire national CGT des Finances publiques ne dit pas autre chose. « Au niveau national, l’objectif du gouvernement est de ramener l’effectif de 103 000 fonctionnaires à 60 000. Cela s’inscrit dans la politique générale de diminution des dépenses publiques. La DGFIP en subit la plus grosse part. »

Démarrage en 2021

Cela passe par la fermeture de trésoreries comme celle de Denain. Dès lors, il est difficile de comprendre la politique de démétropolisation et l’argument donné par le ministère selon lequel « cette démarche s’inscrit dans l’objectif (...) de rapprocher les administrations de nos concitoyens [et de répondre] à la crise de confiance envers l’État de populations éloignées des grandes agglomérations, qui tient notamment à la disparition de certains services publics ». Sauf que pour l’heure, on ne sait rien de la réalité de ces mouvements et des services qui seront impactés. Les opérations de localisation en région doivent commencer en 2021. Si les agents refusent de suivre la mission pour garder leur emploi, ils se verront proposer une rupture conventionnelle et une indemnité de départ volontaire. Mais, reproche-t-on au siège national de la CGT Finances publiques, « c’est la nature même de cette annonce qui est stupéfiante. Comment croire que la désertification due à un désengagement de l’État en termes d’implantation de services publics, d’infrastructures routières ou ferroviaires pourra se résorber d’un claquement de doigts ? Comment croire que le départ de structures et emplois vers des territoires subissant depuis trop longtemps la désertification sera facile ? Comment croire que le déménagement de ces structures participera à une véritable réimplantation de services publics ? » D’autant que depuis le 1er janvier, les agents sont fortement incités à prioriser la dématérialisation du traitement des demandes des particuliers. Il n’est d’ailleurs plus possible de se rendre dans sa trésorerie sans rendez-vous préalable.