DUNKERQUOIS

A Zuydcoote, les malades se battent pour leur dignité

Publié le 18 février 2019 à 17:55

L’Hôpital maritime de Zuydcoote se voit privé d’équipements de pneumologie, malgré l’opposition des usagers et l’incompréhension de la communauté médicale.

Depuis décembre, les associations de patients, l’ARDEVA, association régionale des victimes de l’amiante, la FNATH, fédération des Accidentés du Travail et Handicaps, la CGT dénoncent le refus de doter l’Hôpital Maritime de Zuydcoote de deux lits de sommeils et le retrait d’une cabine de pléthysmographie, un appareil qui permet d’évaluer les capacités et les variations de la pression pulmonaire.

Lors d’une mobilisation de défense de l’hôpital maritime, en 2013 (Photos archives Claire Goulois)

Rien n’y fait. Ni l’intervention auprès de la ministre Agnès Buzyn, ni la visite d’Alain Bruneel, député communiste du Nord lors de son tour de France des hôpitaux, ni les interventions de Fabien Roussel, député du Nord, et, tout récemment, de Michelle Gréaume, sénatrice PCF. Et Paul Christophe (UDI) d’abonder : « je ne laisserai pas dépouiller l’hôpital maritime.  »

Pourtant, selon Christelle Monaca, responsable de l’unité sommeil au CHRU de Lille, « il n’y a pas de restriction à l’installation de lits de sommeil dans un hôpital comme Zuydcoote  ». Autrement dit : ce n’est pas parce que l’hôpital maritime est un établissement de soins sans suite que ces équipements ne se justifient pas. Au contraire.

Paul Christophe, député :« Je ne laisserai pas dépouiller l’hôpital. »

Le Dunkerquois est très touché par les affections des poumons liées à l’amiante, dont le cancer de la plèvre (+269 % de mortalité due à ce cancer par rapport à la moyenne nationale). Une étude de l’Observatoire Régional de la Santé Nord – Pas de Calais (fermé en 2017 faute de financement régional) l’a révélé en 2012.

Le pléthysmographe est nécessaire pour déterminer la prise en charge de la maladie professionnelle liée à l’amiante. Le lit de sommeil étudie les apnées (arrêts respiratoires) pendant le sommeil. Outre le fait que les lits de sommeil de l’hôpital de Dunkerque sont saturés (plusieurs mois d’attente), l’absence de ces équipements met en danger la pérennité d’un poste de pneumologue et donc de l’ensemble du service de réhabilitation respiratoire de l’Hôpital maritime de Zuydcoote.

Le cas de Zuydcoote est un exemple révoltant du retard en santé publique, dénoncé en juin dernier par l’académie de médecine. « L’espérance de vie dans les Hauts-de-France aujourd’hui, c’est l’espérance de vie de la France en 2003. Il y a donc un écart de 15 ans dans l’histoire. Cet écart, il faut absolument le rattraper, pour le rattraper, il faut le vouloir et s’organiser  », expliquait alors Gérard Dubois, membre de l’Académie de médecine et chef du service de santé publique à l’hôpital d’Amiens.

ENCORE UNE RÉFORME PAR ORDONNANCES

On manque de médecins ? Le gouvernement veut supprimer le numerus clausus, qui permettra d’augmenter le nombre de médecins formés. On manque d’hôpitaux ? D’ici 2022, 500 à 600 hôpitaux de proximité seront rénovés et labellisés, promet la ministre de la Santé Agnès Buzyn. Tels sont les deux principaux axes du projet de réforme de la santé, examiné en conseil des ministres le 13 février.

Objectif ? Garantir un système de santé « mieux organisé  », qui « favorise les coopérations entre les acteurs  », indique l’Elysée. Des moyens supplémentaires, donc ? Pas vraiment. Les hôpitaux de proximité devraient voir leurs missions recentrées sur la médecine générale, la gériatrie et la rééducation. Peut-être encore un peu de radiologie, mais quasiment plus de chirurgie ni de maternité.

Comme pour la réforme du droit du travail, la réforme du système de santé sera appliquée non pas dans le cadre d’un débat parlementaire, mais par ordonnances. La pilule, on l’avale avec ou sans eau ?