Ex-bassin minier

Les aide-soignants et les aides à domicile sont anxieux

Publié le 16 avril 2020 à 19:02

Si cela va un peu mieux pour les salariés du groupe Filieris, le compte n’y est toujours pas. L’opérateur de santé issu du régime minier réclame davantage de moyens pour accomplir ses missions.

Au lendemain de la mise en place du niveau 3 de la lutte contre la prolifération du coronavirus et des mesures présentées par le Premier ministre, la secrétaire du syndicat des personnels de la CGT CANSSM [1], Aurore Dutailly, présentait un bilan sans complaisance. Elle listait ainsi les nombreuses fermetures d’établissements en dehors des magasins d’alimentation, les pharmacies et tous les établissements en rapport direct avec la santé, la recommandation de ne sortir qu’en cas de nécessité. Parallèlement, les lits occupés par des malades du Covid-19 ont quadruplé.

Et puis, dit-elle, « les consultations chez les généralistes ont augmenté, atteignant 200 patients par jour. La télémédecine se généralise face à la prolifération du virus. Nos hôpitaux sont transformés en machines de guerre ». Si des entreprises ferment afin de protéger le personnel, observait-t-elle alors, «  le gouvernement appelle les ouvriers à se rendre au travail. Les livreurs de repas sont invités à déposer les repas à la porte et, dans les supermarchés, les mesures de protection sont renforcées ».

Sentiment d’isolement

Dans un tel contexte, les aides à domicile et les aide-soignants de Filieris ont voulu faire valoir leur droit de retrait. Pour Aurore Dutailly, cela aurait risqué de rompre la continuité du service, privant les personnes âgées de soins alors que certaines présentent des pathologies graves.

Le syndicat du personnel de Filieris a alors interpellé l’employeur et la CANSSM. Dans un premier temps, les réponses se sont faites attendre quant aux mesures pour obtenir du matériel de protection efficace. « Or, dit la syndicaliste, il est impensable qu’un aide-soignant puisse se mettre à un mètre de la personne âgée. [La réalité], c’est presque du corps à corps, respiration à respiration, c’est aider la personne à bouger, à prendre sa toilette. » Les aides à domicile et aide-soignants se sentent isolés.

« À ce stade, explique Aurore Dutailly, la direction nous conseillait de mettre un masque en cas de suspicion. Mais les quelques masques que nous avions obtenus étaient en papier ! » Un stock de masques datant de l’épisode épidémique du H1N1 avait aussi été retrouvé et utilisable. L’appel lancé par les aide-soignants, aides à domicile et le personnel soignant en établissements, soit environ 3 000 personnes (tout personnel compris), en direction de l’employeur et de l’Agence régionale de Santé (ARS) pour obtenir des moyens de protection efficaces et en nombre suffisant n’est pas resté vain.

Mais plus d’un mois après le début du confinement, le personnel dispose de 80 000 masques pour 2 500 soignants qui travaillent sur un territoire compris entre Auchel et Valenciennes. Cela reste insuffisant. « Il faudrait entre deux et quatre masques par jour et par salarié. Mais aujourd’hui, confie Aurore Dutailly, nous manquons surtout de sur-blouses. Les commandes ont été passées et nous ne pouvons pas dire que notre direction ne nous écoute pas. Ce sont les livraisons qui n’arrivent pas, malgré les engagements de l’État.  »

Kits de protection insuffisants

Plus généralement, le personnel a besoin d’être équipé de kits de protections complets : masques, sur-blouses, sur-chaussures, gants, charlottes, lunettes, gel. Là encore, le stock est insuffisant pour l’ensemble des aide-soignants et des aides à domicile. Sans ces protections, le personnel n’est pas incité à intervenir. Une pétition a d’ailleurs été lancée sur le site internet de la fédération des Mines et de l’Énergie CGT. Mais l’enjeu de la santé doit-il reposer sur les dons des particuliers et des entreprises, s’interrogent les salariés de Filieris ?

« Dans un bassin minier, déjà fortement défavorisé au niveau santé, où l’offre de soins est très insuffisante, on expose notre personnel soignant à un danger évident », insiste Aurore Dutailly. « Que va-t-il se passer si demain plusieurs de nos salariés sont atteints du Covid-19 par négligence et/ou insuffisance des moyens de protection ? Qui en portera la responsabilité ? Une priorité absolue doit être donnée à leur équipement. »

Cela ne s’arrête pas là. Le groupe Total a fait un don en bons de carburant (30 euros par personne) qu’ont touché les aide-soignants des six établissements que Filieris compte dans la région. Mais il n’y a rien pour les aides à domicile. Ce sont eux, pourtant, qui font le plus de kilomètres chaque jour. Ces derniers ne sont remboursés que sur une base forfaitaire de 60 centimes.

Nous allons revendiquer une hausse salariale et une prime gouvernementale, dit la CGT. Sans compter une augmentation des jours de repos.

Notes :

[1Caisse nationale Sécurité sociale minière (CGT-CANSSM)