Aéroports de Paris

La privatisation est votée mais un RIP contrarie le projet

par Philippe Allienne
Publié le 16 avril 2019 à 14:36

La Ve République n’avait jamais vu cela : 248 parlementaires, toutes étiquettes confondues, ont lancé un référendum d’initiative partagée. Objectif : faire empêcher par le peuple la privatisation d’Aéroports de Paris.

La Ve République n’avait jamais vu cela : 248 parlementaires, toutes étiquettes confondues, ont lancé un référendum d’initiative partagée. Objectif : faire empêcher par le peuple la privatisation d’Aéroports de Paris.

RIP. Rien à voir avec le « Rest in Peace », autrement dit « Repose en paix » que l’on prononce sur la tombe d’un défunt. Ici, il s’agit de sauver un fleuron national de la privatisation voulue par le gouvernement. Rappelons que l’État détient 50,63% des parts. Alors, après le rejet de ce projet par le Sénat, 248 députés et sénateurs de droite et de gauche ont choisi d’utiliser ce référendum d’initiative partagée actuellement si populaire chez les Gilets jaunes. PS, PCF, LR, FI, LT, RDSE, UDFI, UD, non inscrits. Tous se sont levés contre le projet de privatisation déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale. La procédure a été enclenchée juste avant l’adoption définitive par le Parlement, ce jeudi 11 avril, du projet de loi Pacte dont la privatisation du groupe ADP est une mesure phare. Cette loi a été adoptée par 147 voix contre 50 et 8 abstentions.

Du même coup, l’Assemblée s’est prononcée pour la privatisation d’ADP. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, n’a pas hésité à voir, dans le jeu des parlementaires à l’origine du RIP, de flatter les populismes. « Tous ceux qui se réunissent dans un attelage de circonstance pour proposer un référendum d’initiative partagée, alors que le texte n’est même pas encore voté, font le jeu des populismes et affaiblissent la démocratie représentative », a-t-il lancé lors de l’ouverture des débats. « Honteux et antidémocratique » a réagi le député Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. Si la procédure de référendum n’est pas rejetée par le Conseil constitutionnel, il faudra que 10 % des électeurs français se prononcent dans un délai de neuf mois afin de casser cette partie de la loi Pacte.

En voulant privatiser le groupe ADP, le gouvernement entend trouver les financements nécessaires à la création d’un fonds de 10 milliards d’euros pour l’innovation. Il veut en quelque sorte sacrifier la souveraineté française sur ses aéroports en échange d’une souveraineté technologique, dans l’intelligence artificielle, face à la Chine et aux États-Unis. Par ailleurs, précise le ministre de l’Industrie, il s’agit de développer ADP pour en faire « le premier hub en Europe, devant Londres ».

ADP en chiffres

Le groupe Aéroports de Paris comprend les aéroports de Paris Charles de Gaulle, Paris Orly et Paris Le Bourget. Il compte aussi un héliport à Issy-les-Moulineaux et dix aérodromes. En 2018, il a réalisé un chiffre d’affaires de 4,5 milliards d’euros. La vente des parts de l’État (50,63 %) pourrait lui rapporter 8,8 milliards d’euros. A cette somme s’ajouterait une prime de 1,5 à 2 milliards d’euros si l’opération permet à un futur actionnaire de devenir majoritaire.