1947-1948 : patronat et réaction relèvent la tête

par PIERRE OUTTERYCK
Publié le 5 octobre 2018 à 11:42 Mise à jour le 9 février 2021

Au milieu des années 1930, s’ébauche une vaste mobilisation contre le fascisme au pouvoir (Italie, Allemagne et Japon). Elle s’organise lentement. Communistes, socialistes, progressistes, démocrates et parfois même patriotes, croyants et non-croyants, États-Unis et Union soviétique se retrouvent côte à côte. Cette alliance n’efface pas les contradictions antérieures mais permet la victoire du 8 mai 1945 et celle du 2 septembre 1945 face au Japon. En France, le rôle de la classe ouvrière fut primordial. Le 4 juin 1936, malgré les pressions, le ministre de l’Intérieur, Roger Salengro, proclame qu’il n’enverra pas les gardes mobiles contre les travailleurs en grève. Après son suicide en novembre 1936, la répression reprend, en particulier lors de la grève de l’automne 1938. Elle sera d’une violence inouïe durant les années noires de l’Occupation (1940-1944). De 1944 à 1947, les travailleurs français conquièrent des droits nouveaux : Sécurité sociale, statuts des mineurs et des fonctionnaires, nationalisation des banques et de l’énergie, etc. Dans le monde, c’est la création de l’Organisation des Nations unies (ONU) et de la Fédération syndicale mondiale qui regroupe tous les syndicats non confessionnels. Mais le 12 mars 1947, le président des Etats-Unis, Harry S. Truman, dénonce l’URSS et « le rideau de fer abattu sur l’Europe  ». Répondant au complexe militaro-industriel américain, il propose le plan Marshall, officiellement appelé « programme de rétablissement européen », pour contrôler l’économie de l’Europe. Dès le mois de mai 1947, en France, les ministres communistes sont exclus du gouvernement. La colère sourd au sein du PCF, qui, depuis la Libération, avait impulsé la renaissance industrielle, alors que le manque de logements et de ravitaillement gangrenait la vie quotidienne des Français. À l’automne 1947, Léon Delfosse, dirigeant de la CGT, est démis de son poste de vice-président des Charbonnages de France. Pour les mineurs, cette provocation est une agression. La colère éclate : mineurs et autres corporations entrent en grève. Le ministre socialiste de l’Intérieur, Jules Moch, choisit la manière forte et brise le mouvement. Début décembre 1947, la CGT doit suspendre la grève. A la fin de cette année-là, Jules Moch épure les CRS de leurs éléments progressistes. Il accorde aux préfets des pouvoirs de répression extraordinaires. Au sein de la CGT, des militants financés par les syndicats américains organisent la division et créent Force ouvrière. Partout, l’anticommunisme est de retour. C’est la « guerre froide », l’affrontement entre les États-Unis et l’Union soviétique, ouvrant une période difficile qui aboutira, en 1991, à l’implosion de l’URSS.