La vie errante de Tomasz Olszanski

par Jacques Kmieciak
Publié le 6 septembre 2019 à 17:09

Il est l’une des figures emblématiques du syndicalisme polonais.

D’origine paysanne pauvre, Tomasz voit le jour en novembre 1886 en Galicie, au cœur d’un territoire polonais administré par l’empire austro-hongrois. A 20 ans, chassé par la misère, il fait le choix de l’exil qui le conduit, dès 1909, dans la région lensoise. Il y exerce comme houilleur pour la Compagnie des mines de Courrières et se syndique à la CGT. En 1922, il obtient la nationalité française ; ce qui lui offre la possibilité de militer au grand jour. Un an plus tard, il accède au poste de secrétaire de la Fédération unitaire des mineurs (CGTU) dont il devient un permanent. Ses cibles ? Les magnats de la mine accusés de « bafouer les droits des Polonais » , mais aussi l’ État français « complice de leurs exactions ». Cet « agitateur volant  » sillonne alors l’Hexagone, multipliant les meetings dans les bassins miniers de charbon, de fer ou de potasse.

Certaines années, il lui arrive d’animer jusqu’à 150 réunions publiques ! Sa présence est un gage de succès tant la popularité de ce militant communiste est grande. Son bilinguisme est un atout. Très vite, l’État français s’agace de cet activisme. La République lui reproche de lui « avoir porté préjudice » en organisant grèves et manifestations depuis son arrivée en France. Dans un contexte de vives tensions sociales, elle cherche à tuer dans l’œuf toutes velléités de contestation.

En 1932, en dépit de la mobilisation du Secours rouge international et d’intellectuels comme André Malraux ou Paul Nizan, elle obtient d’une Justice aux ordres sa dénaturalisation, une mesure préalable à une expulsion effective en octobre 1934... Devenu apatride (lire : la Polonité en quête d’avenir), Olszanski est « abandonné » discrètement en Belgique.

Indésirable dans la Pologne fascisante des Colonels, il trouve finalement l’asile politique en URSS où il vivra jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. A la Libération, il décline l’offre du PCF d’un retour en France. Celui qui se considère néanmoins toujours comme le « fils du prolétariat français », retourne à Varsovie, en novembre 1945. Il rejoint les rangs du Parti ouvrier polonais (PPR).

« C’est ainsi qu’après 40 années, je revins dans ma patrie : la Pologne Populaire. Ce retour, je le devais à l’Armée rouge et à l’Armée polonaise, à leurs victoires sur les ennemis de mes pères et aïeux, les seigneurs terriens et les capitalistes » , témoignera t-il.

A lire : « Un militant syndicaliste franco-polonais » « La vie errante de Thomas Olszanski » (1886 – 1959) Texte traduit et commenté par Mylène Mihout, Presses universitaires de Lille, 1993, 395 pp.