Martha Desrumaux

Une campagne nationale

Publié le 8 décembre 2019 à 15:11

Qui aurait pu croire que Martha Desrumaux, aurait un jour à son nom un espace public à Paris et un collège à Lille ? De 1897 à 1982, elle connaît les souffrances, les angoisses, la répression et aussi les espoirs des femmes engagées dans la CGT et au Parti communiste. Retour sur le parcours de cette figure de la lutte sociale qui a marqué le XXe siècle. jours pas le droit de vote.

En 1906, à l’âge de 9 ans, elle est placée comme domestique. Mépris, humiliations, absence de solidarité, Martha s’enfuit après quelques mois. En 1910, à 13 ans, elle adhère à la CGT. Que de quolibets, de moqueries a-t-elle connus dans l’organisation syndicale profondément sexiste, structurée dans une époque où les femmes n’étaient que des « mineures » selon la loi.

En 1927, ayant appris à lire et à écrire deux ans auparavant, Martha dirige une délégation de femmes à Moscou pour le 10ème anniversaire d’Octobre. Une photo la montre avec des femmes du monde entier autour de Clara Zetkin. La plupart d’entre elles deviendront des dirigeantes antifascistes et anticolonialistes, comme ce sera aussi le cas de Martha.

En 1928-1929, à Halluin, elle organise les femmes ouvrières et ménagères face au patronat textile, déjà convaincue du rôle et de la place des femmes dans l’Histoire.

En 1936 en France, les femmes n’ont toujours pas le droit de vote. Dans le film de Jean Renoir, La vie est à nous, Martha les incite à s’impliquer dans les élections de mai 1936 : «  Femmes du Peuple de France, travailleuses manuelles et intellectuelles, rassemblez-vous pour sauver votre foyer en sauvant la Paix ! »

Syndicaliste, communiste, résistante et déportée

En 1940, Martha, entrée très tôt dans la Résistance, appelle les mineurs à la grève. Neuf mois plus tard, des centaines de femmes manifestent dans le Pays noir en criant : « Pas de charbon pour les boches !  » En août 1941, la répression s’abat, violente et brutale… Première Française déportée à Ravensbrück le 28 mars 1942, elle y organise sabotages et solidarités. En 1945, elle devient co-secrétaire de l’UD du Nord, c’est la première femme qui reçoit une telle responsabilité !

Des dizaines d’années plus tard, grâce à Philippe Detrez, secrétaire de l’UD en 2006, Sylvie Manguine, sa petite-fille, et Laurence Dubois, de l’association des Ami.e.s de Martha Desrumaux, Martha est enfin sortie de l’ombre. Philippe Martinez les en a d’ailleurs félicité, saluant cette initiative avec lucidité : « C’est bien ce que vous faites, les ouvrières sont les oubliées de l’histoire… y compris dans ma propre organisation  ». Laurence Dubois a ainsi expliqué, lors d’une rencontre avec l’historienne Michelle Perrot : « Nous voulons que Martha soit reconnue par les historien(ne)s et aussi par le mouvement féministe ». L’ouvrière Martha Desrumaux s’est en effet battue toute sa vie pour que les femmes puissent avoir toute leur place dans la vie syndicale et politique.

Dans son dernier ouvrage, Je suis Martha Desrumaux, les nazis ne m’ont pas eue  [1] , l’historien Pierre Outteryck rapporte plus précisément les combats de Martha entre 1930 et 1945, ses luttes contre l’extrême droite et le fascisme, pour défendre les valeurs républicaines et humanistes et élargir les conquis sociaux. Des combats toujours actuels.

P-C DUNAURE

Notes :

[1Chez Geai Bleu Éditions, 18€ franco de port