Achille Blondeau au Centre historique minier de Lewarde en 2013.
 © Jacques Kmieciak
Louis Renault versus Achille Blondeau à Auby

Bataille mémorielle sur fond de lutte des classes

par Jacques Kmieciak
Publié le 7 octobre 2022 à 11:26

Désireuse de baptiser une rue du nom du collaborateur Louis Renault, la municipalité s’est attiré les foudres du PCF et de l’Institut d’histoire sociale CGT du Douaisis.

Soucieuse de « rendre hommage à celles et ceux qui ont travaillé et travaillent encore à l’usine Renault de Douai », la municipalité décidait l’été dernier de donner à une rue de la zone des Près Loribes le nom de Louis Renault (1877 – 1944), le fondateur du groupe éponyme nationalisé à la Libération. Une décision qui provoquait l’ire de Freddy Kaczmarek (PCF) à la tête de l’opposition, consterné à l’idée qu’un «  collabo  » puisse ainsi être mis à l’honneur.

Un patron de combat

Dans la foulée, Dominique Ben, le président de l’Institut d’histoire sociale CGT du Douaisis et environs (IHS CGT) interpellait par courrier Christophe Charles, maire (PRG). Il lui rappelait que, selon l’historienne Annie Lacroix-Riz, « les fonds et documents disponibles ne laissent aucun doute sur le caractère volontaire de la collaboration économique et politique de Louis Renault  ». Dans les années 1990 déjà, la direction du groupe avait tenté de réintroduire le portrait du patron collaborationniste dans la salle du conseil d’administration de Renault-Douai. La mobilisation de syndicalistes avait fait échouer cette tentative de réhabilitation ; la CGT rappelant aussi à l’époque que cet homme s’est toujours conduit comme « un patron de combat vis-à-vis des libertés, de la dignité de ses salariés qui n’avaient à l’époque que le droit de travailler, de se taire ou de se faire licencier  ». La Ville renonçant finalement à son projet, l’IHS CGT lui suggérait de donner à cette artère le nom d’Achille Blondeau (1925 – 2019), un « enfant du pays » né à Auby ! Résistant à l’occupant allemand, membre des FTP, il fut l’un des artisans, en sa qualité de dirigeant de la Fédération du Sous-sol de la CGT, de l’implantation de l’usine Renault dans le Douaisis au début des années 1970.

Mauvais perdant

Cette proposition soutenue par Freddy Kaczmarek n’a toutefois pas été retenue ; la majorité municipale tranchant, le 6 septembre dernier, en faveur d’Etienne Lenoir (1822 – 1900), un chercheur franco-belge connu « pour ses travaux sur le moteur à explosion qui a révolutionné l’industrie automobile  », note Dominique Ben. Un choix qui ne le satisfait guère. Mauvais perdant, Christophe Charles réputé pour son sectarisme, n’a pu s’empêcher de reprendre les calomnies « lancées par la bourgeoisie et l’extrême droite dans les années 1970 à l’endroit de Georges Marchais faisant croire que l’ancien dirigeant du PCF était parti travailler volontairement en Allemagne  » durant la Seconde Guerre mondiale. Un mensonge « que les historiens ont récusé  », lui a rappelé fort justement Dominique Ben. Celui-ci demande désormais que la place où était situait sa maison natale porte le nom d’Achille Blondeau.