Bernard Letemps, devant la réplique du wagon des armistices. © Jacques Kmieciak
Compiègne

Le destin tourmenté du wagon des armistices

par JACQUES KMIECIAK
Publié le 6 février 2023 à 11:14

La réplique du wagon dans lequel ont été signés les cessez-le-feu de 1918 et 1940 constitue la principale attraction du Mémorial de l’Armistice de la forêt de Compiègne. L’original a connu une singulière destinée.

Jusque-là, ce véhicule luxueux, propriété de la Compagnie internationale des wagons-lits, avait vécu une existence paisible à transporter les voyageurs de Paris vers la Bretagne ou la Normandie. En septembre 1918, l’armée française le réquisitionne pour le transformer en « voiture-salon-bureau » avant de le mettre à disposition du maréchal Foch, général en chef des armées alliées, basé à Senlis. Le 11 novembre 1918, l’armistice y sera paraphé dans la forêt de Compiègne, près de Rethondes. Après la guerre, il sera exposé dans la Cour d’honneur des Invalides avant de regagner, en 1927, la clairière de l’Armistice où a été aménagé un espace mémoriel. Le succès est immédiat au point que le nombre record de 191 000 visiteurs est atteint onze ans plus tard. « Alors que la situation se tend en Europe, l’attachement ainsi porté au wagon de l’Armistice exprime le poids prégnant du souvenir de la Grande Guerre dans la mémoire collective des Français », estime Bernard Letemps, président de l’association du Mémorial de l’Armistice qui gère le site aujourd’hui.

Un parfum de revanche

Le wagon aurait pu jouir d’une retraite méritée si Adolf Hitler, plutôt revanchard, n’avait émis l’idée d’y signer l’armistice, cette fois défavorable à la France, de juin 1940. Le bâtiment qui l’abritait est alors rasé et le wagon immobilisé à son emplacement de 1918, en présence des plus hauts dignitaires du IIIe Reich. L’occupant détruit les monuments commémoratifs de la clairière. Seule la statue de Ferdinand Foch trouve grâce aux yeux du Führer. Comme s’il s’agissait d’offrir au maréchal de constater l’ampleur du désastre ? Tel un butin de guerre, le wagon est ensuite exposé au Lustgarden à Berlin avant de finir son existence en Thuringe en avril 1945, victime d’un incendie. Ainsi « prend fin son odyssée doublement historique », poursuit Bernard Letemps. Du brasier subsisteront notamment deux rampes d’accès visibles au musée de l’Armistice. Reconstruit, celui-ci accueille depuis 1950 une copie conforme à l’original. Si d’aucuns se l’imaginent encore en plein air comme sur les photos d’archives, « contrairement à une idée reçue, depuis cette date, le wagon n’a jamais quitté son abri ».

Un taxi de la Marne

Tout au long d’un parcours muséal qui fait la part belle à la montée des périls en Europe, du traité de Versailles de juin 1919, vécu tel un diktat par l’Allemagne, au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, d’autres surprises attendent le visiteur comme ces vues stéréoscopiques (en relief) qui nous plongent dans l’enfer des tranchées ou encore ce taxi de marque Renault, « l’un des derniers exemplaires à avoir participé à la Bataille de la Marne ». Le musée de l’Armistice 14-18, route de Soissons à Compiègne est ouvert chaque jour (sauf le mardi) de 10 heures à 17 h 30 (et jusque 18 heures d’avril à septembre). Tarifs : 8 euros pour un adulte et 6 euros pour un enfant de 7 à 18 ans. Rens. au 03 44 85 14 18. Site : musee-armistice-14-18.fr.

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