Damien et Damien(s)

par JEROME LEROY
Publié le 18 juin 2021 à 13:22

Ainsi, la scandaleuse agression dont a été victime le président Macron lors de son déplacement à Tain- l’Hermitage, par un ignoble individu du nom de Damien Tarel, qui a eu néanmoins le sens de la formule avec son « Montjoie Saint-Denis, à bas la Macronie » a été l’objet d’une comparution immédiate dont le jugement est tombé : dix-huit mois de prison, dont quatre ferme, avec mandat de dépôt. On dirait ces peines ridicules qui frappaient au petit bonheur la chance les Gilets jaunes en 2018-2019. Mais c’est une peine bien légère pour une telle atteinte à la personne sacrée du Président de la République, le pire crime qu’on puisse imaginer. Emmanuel Macron giflé, Jupiter souffleté, quelle tragédie ! La fonction présidentielle va-t-elle s’en remettre ? Il a de la chance, ce Damien Tarel, dont on ne sait pas s’il est un personnage des Visiteurs ou un maurassien incompris ou encore un membre de la nébuleuse fasciste qui menace le pays sur les réseaux sociaux. Oui, il a de la chance, parce qu’un autre Damien, parfois écrit avec un s, prénommé François Robert, domestique et voleur, tenta d’assassiner Louis XV le 5 janvier 1757 avec un canif et le piquouilla légèrement. On notera que Louis XV, comme Emmanuel Macron, demanda aussitôt à ce qu’on ne fasse pas de mal à son agresseur. Il n’empêche, dans les deux cas, ils ont laissé avec raison la justice s’exercer dans toute sa rigueur, une rigueur qu’on regrette aujourd’hui. En 1757, en effet, le Parlement de Paris condamna « ledit Damien à faire amende honorable devant la principale porte de l’Église de Paris, où il sera mené et conduit dans un tombereau, nu en chemise, tenant une torche de cire ardente du poids de deux livres ; et là, à genoux, dire et déclarer que méchamment et proditoirement, il a commis le très méchant, très abominable et très détestable parricide, et blessé le Roi d’un coup de couteau dans le côté droit, ce dont il se repend et demande pardon à Dieu, au Roi et à la Justice. Ce fait, mené et conduit dans ledit tombereau à la Place de Grève ; et sur un échafaud qui y sera dressé, tenaillé aux mamelles, bras, cuisses et gras de jambes, sa main droite, tenant en icelle le couteau dont il a commis ledit parricide, brûlée de feu de soufre ; et, sur les endroits où il sera tenaillé, jeté du plomb fondu, de l’huile bouillante, de la poix-résine fondue, de la cire et du soufre fondus ensemble ; et ensuite son corps tiré et démembré à quatre chevaux, et ses membres et corps consumés au feu, réduits en cendre, et ses cendres jetées au vent ». Ça, on savait vivre à l’époque, et c’était autre chose que le tribunal de Valence, noyauté probablement par des juges rouges du Syndicat la magistrature. Nous sommes tombés bien bas. À l’époque, le corps du Roi, c’était sacré. Voltaire, qui s’est intéressé à l’affaire, raconte d’ailleurs dans son Précis du règne de Louis XV que le souverain, pour se consoler, invita le soir même Mcfly et Carlito à Versailles. Histoire de rappeler la grandeur de sa fonction avec des hôtes dignes de lui, comme Emmanuel Macron. Tout comme.

Dernier livre paru : Vivonne (éditions de La Table Ronde).