La semaine des hypocrites

par JEROME LEROY
Publié le 29 octobre 2021 à 10:53

Quel est le rapport entre Jean Castex, François Hollande et Sandrine Rousseau ? Aucun, si ce n’est une remarquable hypocrisie et une manière de se foutre du monde dans des proportions considérables. Commençons par Castex. Il a annoncé en décembre une « indemnité inflation » de cent euros pour les gens en gagnant moins de 2 000. Il est vrai qu’au moment où les Français ont l’impression que le litre de gasoil va finir par atteindre celui du Chanel n°5 et que des Gilets jaunes pointent de nouveau leur nez sur les ronds-points, il y a urgence à prévenir un incendie qui pourrait ravager la macronie en pleine campagne présidentielle. On ne lui objectera pas que pour cent balles, aujourd’hui, t’as plus rien. On va dire que c’est bien gentil de sa part et que dans ces temps de vaches maigres, c’est toujours bon à prendre. On a juste le droit de se souvenir. Se souvenir, par exemple, qu’au début du quinquennat, au nom de la politique visant à ne pas décourager les premiers de cordée (ils sont passés où, ceux-là, d’ailleurs ?), Macron avait décidé de supprimer l’ISF et, en même temps, de baisser les APL de cinq euros. Un exemple parmi d’autres qu’il vaut mieux être pauvre à six mois des élections si vous voulez qu’on vous fasse l’aumône. Avec Hollande, nous avons affaire à un autre genre de beauté. L’ex vient de sortir un livre, encore un, au titre martial : Affronter. On reconnaîtra tout de même un certain culot (ou une amnésie soudaine) de donner un tel titre à un livre quand on n’a même pas eu le courage d’affronter les électeurs à l’issue de son mandat, cas unique dans les annales de la Ve République. Cela ne l’empêche pas, pourtant, de faire le tour des plateaux et de se présenter en sage de la gauche, en statue du commandeur et de pleurer sur la social-démocratie qui a disparu des écrans radar tout en dénonçant une gauche « lilliputienne » en proie à des « guerres picrocholines ». Mais la faute à qui ? Hollande, c’est quand même l’histoire du fossoyeur qui déplore l’existence du cimetière. Sa politique économique (souvenez-vous du CICE) et sa brillante idée de faire d’un inconnu, un certain Emmanuel Macron, son ministre de l’Économie, devraient tout de même lui donner l’envie de cesser cette comédie sinistre de l’éternel retour. Reste enfin Sandrine Rousseau. Dans 20 minutes, le 22 octobre, on apprend qu’elle essuie quelques virulentes critiques du syndicat étudiants Solidaires. On lui reproche, alors qu’elle est vice-présidente de l’Université, en charge de la précarité, son absentéisme. Je suis très heureux que ce soit SUD et pas l’UNI qui l’attaque. On aurait encore dit que c’étaient les réacs et seulement eux qui flinguent Rousseau. Or, là, le tir vient de son camp, son camp proche même. Cela prouve encore une fois les impasses de la pseudo-radicalité intersectionnelle : arrogance et intolérance théoriques, nullité pratique. À force de ne plus penser en termes de classes, Sandrine Rousseau, trop occupée à déconstruire le patriarcat, oublie comment les étudiants, pour une immense majorité, se déconstruisent, eux, dans la précarité. Vous transposez cette façon de faire à l’ensemble du monde du travail et il ne faut plus trop s’étonner d’un total de 35 % à l’extrême droite puisque la gauche se retrouve (sauf le PCF…), avec cette image de puritains qui veulent régir votre rapport au sexe, à la bouffe, à votre origine ethnique mais se foutent comme de l’an quarante de vos fins de mois.