Accueil  >  Idées  >  L’édito

La double peine de la réforme des retraites et de l’inflation galopante

par Philippe Allienne
Publié le 17 mars 2023 à 15:23

Une réforme brutale, injuste et imposée pour rassurer les marchés financiers. Cette réforme des retraites cristallise les colères populaires parce qu’elle montre clairement le visage d’un pouvoir qui choisit entre le peuple et la finance. Il passe en force, ou en tout cas il fait tout pour y parvenir, alors que les Français se débattent dans une inflation qui leur empêche toute perspective, qui brise les plus modestes. Nous revenons dans ces pages sur la crise des produits biologiques. Mais bien au-delà, les gens, ex-clients du bio ou pas, doivent aujourd’hui se restreindre et changer de magasin. On passe de l’hyper ou supermarché classique pour se reporter sur le hard discount.

Les études actuelles le révèlent clairement, à l’instar de celle de l’Observatoire Cetelem/Toluna/Harris interactive : « Sept Français sur dix (69 %) affirment avoir renoncé à faire certaines de leurs courses alimentaires pour des raisons de budget au cours des douze derniers mois. » Parmi eux, « 30 % indiquent que cela a pu concerner des produits qu’ils considèrent comme essentiels. »

Ce renoncement est le plus souvent le fait des plus modestes (83 %), dont les jeunes. De manière plus générale, les Français expliquent que, pour faire face à la hausse des prix de l’alimentaire, ils ont exploré de nombreuses stratégies de consommation. L’étude Cetelem cite « une plus grande attention aux prix en premier lieu, mais également un changement des réflexes alimentaires ». Cela veut dire : manger moins pour un peu plus d’un tiers des personnes interrogées. Qui plus est, lit-on toujours dans ce sondage, « les habitudes de consommation adoptées par les Français face à l’inflation sont à leurs yeux destinées à s’inscrire dans la durée ». Et pour cause, 74 % d’entre eux estiment que les prix vont continuer à augmenter dans les douze prochains mois.

Ce ne sont pas les mesures de saupoudrage promises par le gouvernement qui leur fera changer d’avis. Il faut au contraire indexer les salaires sur l’inflation. Nous constatons au contraire que les demandes d’augmentation exprimées par les salariés se heurtent à un mur du refus. Leurs demandes, pour légitimes qu’elles soient, sont considérées comme dangereuses pour la bonne santé des entreprises !

Ce n’est pourtant pas l’argent qui manque dans les « grandes familles » comme le groupe de Bernard Arnault. Le capitalisme ne semble pas avoir de limites. La volonté réformatrice d’Emmanuel Macron, que ce soit pour le système des retraites ou pour l’immigration (un autre projet qui s’invitera, comme par hasard, bientôt sur la table) s’appuie sur cette nécessité pour la finance : vivre à l’abri d’un capitalisme qu’elle veut pérenne. Mais ces dernières semaines ont sans doute mis à vif la conscience d’injustice et de déclassement de nombreux citoyens. Ils n’en resteront pas là.