Égalité des chances, mon œil !

Publié le 11 septembre 2020 à 12:29

Lorsque l’équipe Macron quittera le pouvoir, il le faudra bien tôt ou tard, les spécialistes en sémantique et autre philosophie du langage auront matière à étudier le vocabulaire qu’elle utilise.

Un vocabulaire toujours emprunt au passé. « L’ensauvagement » cher à Gérald Darmanin et à Marlène Schiappa trouve son origine dans La France Orange mécanique de Laurent Obertone. Cet ancien élève de l’École supérieure de journalisme de Lille a publié son livre en 2013. Depuis, il n’a de cesse de séduire les penseurs et autres acteurs de l’extrême droite. Il a tellement brouillé les pistes, en stigmatisant une partie de la population, que certains croient aujourd’hui que le film de Stanley Kubrick, sorti en 1971, serait responsable de la violence des jeunes désœuvrés et « sauvageons ».

Il faudrait presque « effacer » ce film, un autre verbe qui rencontre actuellement beaucoup de succès.« Ensauvagement » renvoie à la fois à Obertone et à Jean-Pierre Chevènement. Drôle de mélange. Il renvoie plus encore à Nicolas Sarkozy et à ses envolées contre les « racailles ». On voit bien à quel degré d’estime nos dirigeants tiennent le peuple. Non seulement ils ne tirent pas les leçons du langage outrancier de l’ex-président et encore plus ex-ministre de l’Intérieur, mais ils copient sans honte et avec toute la ringardise qui les caractérise ici.

Non décidément, cette droite n’a rien compris. Elle en est restée à des concepts et des demi-idées qui ont toujours prouvé leur inutilité pour vaincre les incivilités et les violences. Des concepts et des demi-idées dont la dangerosité n’est en revanche pas à démontrer. Il est une autre expression qui fait sa réapparition dans la bouche, cette fois, du président Macron lui-même : « L’égalité des chances. » Voilà qui nous ramène quinze ans en arrière quand le gouvernement Villepin imaginait régler les « problèmes » des cités et des banlieues. Il fallait donner les mêmes chances à tous. Les mêmes chances entre les malchanceux bien évidemment. Cela n’a pas marché, et c’est normal.

Cette fois, Emmanuel Macron innove dans la ringardise. En présentant le Plan jeunes, le 8 septembre à Clermont-Ferrand, il reprend une vieille idée qui n’a jamais fonctionné et veut aider encore une fois les employeurs tout en fabriquant des premiers de cordée. Surtout, là où il y a hiatus, c’est que les jeunes n’ont pas besoin de chance pour trouver un travail. Ils ont besoin d’une bonne formation, il ont besoin que l’on retire les freins mis au collège et au lycée, ils ont besoin que l’on supprime Parcoursup qui les empêche de s’inscrire dans les filières qui leur conviennent et de se préparer à un métier qui les fasse vivre dignement et les rende heureux. Tout cela n’a rien à voir avec la chance. Tout cela relève d’un droit fondamental. Celui de vivre normalement, celui du bonheur.