L’AFPA et les foudres du libéralisme

par Philippe Allienne
Publié le 8 novembre 2018 à 14:35 Mise à jour le 13 novembre 2018

Et un coup de plus contre le service public. Qui dit mieux ?

Le 18 octobre, la direction de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) a annoncé un PSE du tonnerre. Avec un « s » pour « sauvegarde », le PSE est, faut-il le rappeler, un Plan de sauvegarde de l’emploi. Cela permet de « limiter le nombre de licenciements » et doit « favoriser le reclassement des salariés dont le licenciement est inévitable ». Le PSE, c’est ce qui remplace le plan social depuis 2002. Il apparaît dans la « loi de modernisation sociale » du 17 janvier 2002, sous le gouvernement Jospin.

Les mille cinq cent quarante et un salariés de l’AFPA dont l’emploi va être supprimé d’ici 2020 ne manqueront pas d’apprécier. Si l’on y ajoute les six cents départs en retraite qui ne seront bien évidemment pas remplacés, cela porte sur un quart des effectifs de l’agence (huit mille personnes actuellement). Rien qu’au siège national, à Montreuil, quatre-vingt-quinze postes sont concernés. Sur l’ensemble du territoire, trente-huit centres de formation sur un total de deux cent six vont être fermés.

A la direction de l’Agence nationale, on parle d’un « plan de transformation de l’AFPA », autrement dit, d’une réorganisation indispensable pour la survie de cet organisme. En fait de réorganisation, on assiste à un véritable démantèlement. Il a d’ailleurs commencé sous les années Sarkozy, lorsque la politique de droite a ouvert l’AFPA au marché concurrentiel, en 2009. Mais en 2004, déjà, l’organisme avait dû subir le transfert de la commande publique aux régions.

Entre 2012 et 2016, l’AFPA a accumulé des pertes à hauteur de sept-cent-vingt-trois millions d’euros.

C’est oublier un peu vite que l’AFPA a été initiée en 1949 par l’ex-ministre communiste Ambroise Croizat. Depuis près de soixante-dix ans, elle participe, grâce à ses savoir-faire, au service public de l’emploi. Mais ces dix dernières années, on a assisté à des choix politiques qui vont à l’encontre du développement d’une formation professionnelle de qualité. Cela se traduit par l’ouverture à la concurrence, le désengagement financier de l’État, le développement du dumping sur la qualité des formations. Autant d’éléments qui ont mis à mal le modèle économique de l’AFPA.

L’annonce de ce PSE, et d’un avenir bien sombre pour l’Agence, tombe particulièrement mal. Avec près de six millions de chômeurs et travailleurs précaires, la formation professionnelle est un outil indispensable pour permettre de retrouver un emploi stable, de qualité et correctement rémunéré. C’est vrai, le PSE prévoit la création de six cents postes, ce qui ramène les suppressions d’emploi à neuf cent quarante d’ici fin 2020. Ces créations sont sensées «  mieux répondre aux enjeux actuels  ». La direction veut abandonner les formations qui ne répondent plus aux besoins des territoires et entend s’orienter vers une offre plus innovante et plus mobile. Des intentions qui dissimulent mal la casse d’un service public issu d’une volonté politique aujourd’hui tuée par le libéralisme.