Méthode pour se moquer des enfants et des enseignants

par Philippe Allienne
Publié le 19 juin 2020 à 13:56

Cela pourrait faire l’objet d’un jeu qui s’appellerait « Prenez-moi pour un con ». Un jeu dont les règles changent au gré du temps ou de l’humeur de l’organisateur. Mais ici, les joueurs sont les enfants, les enseignants et, accessoirement, les parents.

Ce jeu, c’est celui de la rentrée des classes, celle du 22 juin. Celles et ceux qui avaient tout compris n’ont plus qu’à se replonger dans la méthode, la nouvelle, que vient de réécrire le ministre de l’Éducation nationale. Tâchons de suivre : la rentrée est obligatoire pour tout le monde, sauf pour les lycéens. Si vous avez appris à vos enfants à évoluer dans une surface de 4 m2, vous pouvez leur dire que c’était une blagounette. En revanche, ils ne doivent pas s’approcher les uns des autres de plus d’un mètre. Sauf s’ils sont petits. Les enseignants n’ont plus à porter de masque quand ils font cours. Sauf s’ils sont trop proches des élèves. La liste est longue. Passons sur les règles de nettoyage et l’apprentissage de la désinfection d’un livre.Quand les mômes et leurs profs sauront tout cela, il sera temps de partir en vacances.Vacances ? Ah oui mais pas n’importe lesquelles ! Pour les plus petits par exemple, ceux qui s’apprêtent à entrer en CP dès septembre. Surtout ceux qui vivent dans des quartier po-pu-laires. Les pauvres quoi, ceux qui n’ont pas eu les moyens d’apprendre en confinement.

Pour ceux-là, il y a une solution. Cela s’appelle « un été pour préparer le CP » et c’est dispensé par l’association Agir pour l’École. Elle propose des « vacances apprenantes » aux futurs ex-maternelles et gosses de pauvres. Agir pour l’École serait donc une association liée à l’éducation populaire ? Justement non. Il s’agit d’une structure financée par des entreprises du CAC 40. Rien que cela. Elle n’est pas agréée « association complémentaire de l’École », elle ne respecte pas les protocoles de l’Éducation nationale, mais elle promet d’élargir les inégalités entre les enfants. D’abord parce que les pauvres verront leurs vacances de pauvres gâchées tandis que leurs petits camarades pourront s’amuser librement.

Ensuite parce qu’elles vont faire replonger les familles concernées dans les mêmes affres que ceux vécus lors du confinement.Et pourtant, les services de l’Éducation nationale n’hésitent pas à présenter le dispositif « un été pour préparer le CP » aux municipalités ! Voilà, pour résumer très vite, comment l’Éducation nationale et son ministre se moquent une fois de plus des enseignants. La députée LREM de Paris Anne- Christine Lang vient de signer un brûlot pour traiter les profs de « décrocheurs » (elle reproche à certains d’entre eux d’avoir confondu « continuité pédagogique » et vacances), le ministère lui- même oublie que ce sont les enseignants qui sont les mieux placés pour préparer la rentrée 2020 et pour permettre aux enfants d’accéder à une culture commune. Mais la culture commune n’a pas de rapport avec la culture macroniste.