Quelles leçons après la crise ?

par Philippe Allienne
Publié le 30 avril 2020 à 10:37

Alors voilà, la grande opération de déconfinement va commencer. Évidemment, le 11 mai ne deviendra pas un jour de fête, une cérémonie nouvelle de ce siècle. Car il faut y aller prudemment , dit-on dans les sphères gouvernementales. Et en fonction des couleurs que l’on donnera à nos départements : rouge ou vert ! Car, quoi qu’il en coûtera, il fallait lancer le déconfinement

Avec les inégalités que cela générera entre les territoires, avec les débordements que l’on ne manquera pas de constater, avec le traçage numérique qui, quoi que l’on dise, se transformera vite en flicage des citoyennes et des citoyens. Les jours d’après s’annoncent bien mal. D’ores et déjà , il faut se préparer à affronter une seconde vague épidémique. Avec quelles conséquences ? La reprise économique attendue par nos dirigeants va-t-elle devoir s’auto-modérer, ou s’accommoder d’à coups ? Le temps au moins que les chercheurs trouvent un vaccin au Covid-19. Et après le Covid-19 ?

Ce qui sera sans doute le plus difficile à accepter sera le fait de ne pas tirer les leçons des excès passés - et récents - et des méfaits de la mondialisation et du néo- ibéralisme. Au lieu de parler de « mondialisation » , mieux vaut en fait dénoncer la « globalisation » de l’économie. Or, c’est précisément cette globalisation qui a servi à faire passer des vessies pour des lanternes. Depuis des décennies, les tenants de cette option ont berné les peuples en leur faisant croire que le marché global allait générer le développement et, en même temps, la démocratie. On voit ce qu’il en est à l’échelle mondiale où le premier réflexe des pays occidentaux est de mettre sur le dos de la Chine la responsabilité de la pandémie.

Mais surtout, la globalisation de l’économie a plutôt servi à permettre la circulation des capitaux tandis que l’on ferme les frontières aux humains qui fuient le non-développement, la misère et la guerre. Il a permis aussi de couronner le capitalisme financier et la rentabilité et, comme l’explique fort bien Bernard Thibault, dans son livre intitulé La troisième guerre mondiale est sociale (paru il y a quatre ans), « la guerre économique, plus sobrement appelée “la compétitivité”, génère des dégâts sociaux considérables ». 60 % des emplois sont dans l’économie qui échappe à la réglementation du travail, aux cotisations sociales et à l’impôt. 2,8 millions de travailleurs meurent tous les ans d’accidents ou de maladies liées au travail.

Enfin, et c’est bien ce qui est à l’origine de la pandémie, transformer la planète en immense marché n’a fait que contribuer à la détruire, à détruire l’environnement. Un dirigeant comme Bolsonaro devrait réfléchir à deux fois avant de faire le fier à bras devant le Covid-19. Faillite économique, faillite sociale, faillite environnementale. Voilà les pendants du marché global et du néolibéralisme. Voilà ce contre quoi il faut se battre aujourd’hui. Voilà pourquoi il n’est pas trop tôt pour demander des comptes à nos dirigeants.