Lutte contre la pauvreté

Le Nord, premier Département à soutenir la stratégie du gouvernement

par Mathieu Hébert
Publié le 18 décembre 2018 à 10:54 Mise à jour le 19 décembre 2018

Les ministres Jacqueline Gourault et Christelle Dubos ont signé ce 18 décembre une convention avec le Département du Nord. 25 millions d’euros à la clé.

C’est le premier Conseil départemental à le faire. Le Nord et l’Etat s’engagent dans une démarche commune pour lutter contre la pauvreté. Tel est le sens du déplacement à Lille, ce mardi 18 décembre, de Jacqueline Gourault et Christelle Dubos, respectivement ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, et secrétaire d’Etat auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé.

Les ministres Christelle Dubos et Jacqueline Gourault, avec le préfet Michel Lalande et le président du Département du Nord, Jean-René Lecerf, le 18 décembre à Lille. (Photo Ousmane Mbaye)

La « convention d’appui » signée ce 18 décembre prévoit la mise en œuvre de dispositifs nouveaux ou le renforcement de dispositifs existants et sera dotée d’une enveloppe de 50 millions d’euros sur trois ans (2019-2021), financée à parité par le Département et par l’Etat.

Ce financement participera, entre autres, à des actions de lutte contre le décrochage scolaire (par la création de postes d’agents de liaison entre le collège et le quartier, par exemple) ; un meilleur suivi des jeunes en difficulté (maraudes...) ; des dispositifs de soutien à la parentalité ; ou un suivi renforcé des allocataires du Revenu de solidarité active (RSA) les plus proches de l’emploi...

Examinée la veille en séance plénière au Département, cette convention a donné lieu à de vifs échanges entre la majorité (droite) et l’opposition (PCF et PS). « Votre majorité accueille quelques mesures concédées. Nous ne partageons pas votre enthousiasme  », a déclaré le socialiste Roger Vicot, ancien vice-président en charge de la solidarité et de la lutte contre les exclusions, mais dont le groupe a néanmoins voté la délibération.

Le groupe communiste, lui, n’a pas pris part au vote, marquant son opposition sur la forme et sur le fond.

« La façon dont le dossier a été amené ne nous convient pas  », avance Charles Beauchamp, président du groupe communiste. « Nous n’avons été informés de ce plan alors que notre commission se réunissait. Nous aurions souhaité que groupes politiques soient informés en amont ».

Les communistes ont refusé de prendre part au vote sur le plan pauvreté, dont ils dénoncent la forme et le fond. (Photo archives Mathieu Hébert)

Sur le fond, résume Isabelle Choain, élue du Valenciennois, les communistes saluent quelques avancées, comme la mise en place de maraudes mixtes entre Etat et Département, ou la création d’agents de liaison entre les collèges et les quartiers. Mais ils dénoncent aussi des « gadgets de communication saupoudrés de misérabilisme  » ou, plus globalement, un « manque d’ambition par rapport aux besoins réels  ».

Un exemple ? Le « flou » qui entoure la définition du futur service public de l’insertion, avec la mise en place d’un « guichet unique  ». « Son ébauche est attendue début 2019 », rappelle la maire de Prouvy. « Comment les collectivités, les mission locales et Pôle emploi évolueront-ils et sous quelle gouvernance ? Quelles interactions ? Qui sera derrière ce fameux guichet ? Nous sommes sans réponse  ».

Isabelle Choain déplore que « ce qu’il ressort (du plan pauvreté), c’est que l’individu est responsable de sa situation. Le président des riches prend dans la poche des pauvres. La pauvreté va s’enkyster tant que les richesses ne seront accaparées que par quelques-une ». Bref, « le plan ne se concentre que sur le traitement des conséquences du système libéral, et ne s’attaque pas à la source », résume l’élue communiste.

« Devrions-nous passer à côté de ce plan ?  », s’est interrogé le centriste Olivier Henno, co-président du groupe majoritaire Union pour le Nord (UPN). « On peut le juger insuffisant. Devrait-il être construit autrement ? Peut-être. Mais il y a le temps de la critique et celui de la mise en œuvre. On peut être mécontent de l’arbitre et ne pas mettre le feu au stade. Le groupe UPN a fait le choix de jouer le jeu  ». « C’est dans l’intérêt des gens en très grande difficulté  », a déclaré Jean-René Lecerf, président du Département.

Jean-René Lecerf, président du Département du Nord. (Photo archives Mathieu Hébert)

Cette convention doit compléter au niveau départemental la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, dont les grands axes ont été présentés par le président de la République en septembre 2018.

Economies obligent, certaines actions seront associées à d’autres financements : les bassins de Douai, Valenciennes et Denain notamment, bénéficieront également de financements croisés avec l’Engagement pour le renouveau du Bassin minier, lancé sous le mandat de François Hollande ; quant au sud du département, il s’appuiera sur le récent Pacte pour la réussite du territoire de Sambre-Avesnois.

La signature de ce texte intervient dans un climat social tendu au Département, dont les services social et médico-social sont touchés par un mouvement de grève depuis début octobre. Parti de Tourcoing, le mouvement a gagné le reste du département. Une partie des travailleurs sociaux du département, qui accompagnent les enfants, adultes et familles en difficulté, disent « travailler en mode survie  », déplorant à la fois une dégradation de leurs conditions de travail et de la qualité de la prise en charge des mineurs placés sous protection des services de l’enfance, des jeunes étrangers isolés, des demandeurs d’emploi...

Le mouvement est soutenu par les syndicats FO, CGT et Sud. Ce dernier est la deuxième organisation représentative des personnels du Département du Nord. Lors des élections professionnelles du 6 décembre, Sud a obtenu plus de 21 % des suffrages et maintient à trois le nombre de ses représentants au Comité technique paritaire. La CFDT, qui demeure la première organisation, a obtenu plus de 25 % des voix, mais perd un de ses quatre sièges au CTP. Une rencontre est prévue entre les syndicats et Jean-René Lecerf ce mercredi 19 décembre.