En cette année 2023, on célèbre la 118e année de sa mort. Cela, tous les habitants d’Amiens - ou presque - le savent, mais d’autres le savent un peu plus que d’autres. C’est le cas de Daniel Compère, 75 ans, retraité de l’enseignement (spécialiste de la littérature du XIXe siècle - dont Jules Verne -, il fut longtemps professeur à La Sorbonne, à Paris).
Un écrivain de genre ?
« Enfant, mes parents me parlaient de Jules Verne ; puis, je fus surpris qu’au collège, et au lycée, car on ne l’évoquait jamais, on ne trouve pas non plus son nom dans le Lagarde et Michard », explique Daniel Compère. « Peut-être jugeait-on qu’il était un écrivain inintéressant ; un écrivain de genre. » À 18 ans, il lit tout ce qu’il trouve sur le créateur de L’Île mystérieuse, accumule de la documentation. Très vite, ça se sait ; des passionnés viennent le voir. En 1972, il ouvre un centre de documentation dévolu au romancier. Un peu plus tard la principale maison de ce dernier, située au 2 de la rue Charles-Dubois, est à vendre. La municipalité de René Lamps en fait l’acquisition. « Tout ce que j’avais accumulé sur lui, je l’ai déposé dans cette demeure. » Le lieu s’enrichit de la collection de Gondolo della Riva, un Italien aficionado de l’œuvre de l’auteur nantais-amiénois. « Il avait de l’argent ; il avait donc eu la chance de voyager d’acheter tout ce qu’il trouvait - affiches, mobilier, documents, etc. - à propos du maître, dont le bureau d’Hetzel », confie Daniel Compère. « Il souhaitait alors vendre sa collection qui fut donc accueillie ici. D’où l’essor de la Maison de Jules-Verne, notamment sous l’impulsion de Bernard Sinoquet qui œuvrait à la bibliothèque ; aujourd’hui, le site dépend du musée. » Un essor qui n’a cessé depuis, en témoigne le succès du parcours Aronnax. « C’était la volonté d’Alain Gest, adjoint au maire, président de l’agglomération Amiens-Métropole, que Jules Verne soit présent dans les rues d’Amiens », résume Daniel Compère. Au total, dix-huit lieux (ses maisons, le théâtre, le cirque, le musée, la Caisse d’épargne, etc.) marqués, balisés avec des bornes, des panneaux, des photos, des textes de présenta- tion approfondis grâce à des QR codes étayés par des lectures réalisées par le comédien et metteur en scène Jean-Michel Noirey. « Ça marche très bien : 50 000 visiteurs en un an d’existence. Nouveauté cette année : la mise en œuvre des voyages inclusifs qui se déroulent, grâce à l’accompagnement d’un médiateur, comme une visite guidée sur mesure. » Autre preuve : l’importante exposition autour de Vingt Mille Lieues sous les mers qui sera mise en place au musée tout l’été et jusqu’à la fin octobre.
Sous le charme du Crotoy
On est en droit de se demander ce qui a tant rapproché le célèbre polygraphe breton de la Picardie. En fait, tout commence par sa venue à Amiens en 1856 à la faveur du mariage d’un ami. Il tombe follement amoureux d’Honorine Devianne, née à Vesoul d’un père militaire en fonction dans la capitale picarde ; elle est la sœur de la jeune épouse. Rapidement, ils se marient, résident à Paris dès 1865. À la suite d’un problème de santé, les médecins de Jules Verne lui conseillent de se soigner au bord de la mer. Il tombe sous le charme du Crotoy, petit port de pêche de la Baie de Somme ; il y achète une maison et y installe sa famille. Deux ans plus tard, Il rencontre l’éditeur Hetzel qui l’incite à écrire une série de romans éducatifs et de voyages. Jules s’attèle à la tâche en accumulant les allers-retours entre Le Crotoy et Paris. Survient la guerre de 1870 qui le conduit à acheter une maison au 23 du boulevard de Guyencourt, à Amiens. En 1872, il est accueilli par l’Académie d’Amiens où, un an plus tard, il lit quelques chapitres du Tour du monde en quatre-vingts jours en guise de dis- cours. À partir de là, il devient une personnalité amiénoise, adhère à la Société d’horticulture, à la Société industrielle, etc. 1873 : il déménage au 44 du boulevard Longueville, avant de s’installer, en 1882, rue Charles-Dubois. Son intégration se confirme avec l’amitié qui le lie, lui le républicain plutôt de droite, au radical plutôt de gauche Frédéric Petit. Ce dernier incite Verne à se présenter aux élections municipales sur sa liste. Il est élu, se voit confier les affaires culturelles et sociales (fêtes, théâtre, noms des rues, aides diverses, etc.). La politique lui réussit bien puisqu’il sera quatre fois réélu : en 1892, 1896 et 1900. Le 23 juin 1889, ce sera lui qui inaugurera le cirque en dur. « Une belle mandature », commente Daniel Compère avant de citer ses cinq livres préférés de Jules : Le Tour du monde en quatre-vingts jours, Vingt Mille Lieues sous les mers, Voyage au centre de la Terre, Le Château des Carpathes et Michel Strogoff, « à lire en ce moment pour mieux comprendre la guerre en Ukraine ». D’une modestie qui l’honore, Daniel Compère oublie de citer ses excellents ouvrages qui, pourtant, font autorité chez les Verniens : La vie amiénoise de Jules Vernes (CRDP, 1985), La science romanesque de Jules Verne (éd. Encrage, 2014) et aussi un numéro de la revue Nord consacré à son romancier fétiche, en 2018. De quoi vous faire oublier les lacunes du Lagarde et Michard.
Daniel Compère, expert et passionné de Jules Verne
Toute une histoire : 8 février 1828 : Jules Verne naît à Nantes. 1856 : Il découvre Amiens à la faveur du mariage d’un ami. 1862 : Il rencontre l’éditeur Jules Hetzel (1814-1886). 1865 : Afin de se soigner, il séjourne au Crotoy. 1871 : Il s’installe au 23 du boulevard de Guyencourt, à Amiens. 1872 : Il est accueilli à l’Académie d’Amiens. 1873 : Il s’installe au 44, boulevard Longueville qui porte aujourd’hui son nom. 1882 : Il achète la maison du 2, rue Charles- Dubois qui deviendra La Maison de Jules Verne. 1888 : Il est élu conseiller municipal à Amiens. 1889 : Il inaugure le cirque. 24 mars 1905 : Il meurt dans sa maison du 44, boulevard Longueville.
8 février 1828 : Jules Verne naît à Nantes. 1856 : Il découvre Amiens à la faveur du mariage d’un ami. 1862 : Il rencontre l’éditeur Jules Hetzel (1814-1886). 1865 : Afin de se soigner, il séjourne au Crotoy. 1871 : Il s’installe au 23 du boulevard de Guyencourt, à Amiens. 1872 : Il est accueilli à l’Académie d’Amiens. 1873 : Il s’installe au 44, boulevard Longueville qui porte aujourd’hui son nom. 1882 : Il achète la maison du 2, rue Charles- Dubois qui deviendra La Maison de Jules Verne. 1888 : Il est élu conseiller municipal à Amiens. 1889 : Il inaugure le cirque. 24 mars 1905 : Il meurt dans sa maison du 44, boulevard Longueville.