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Réaction d'Erwan Jacquemart après le débat Macron-Le Pen

Cette prestation n’aide pas à convaincre

Publié le 22 avril 2022 à 11:19

Mettre le bulletin Macron dans l’urne ce dimanche 24 avril pour faire barrage à la candidate d’extrême droite est sans aucun doute la bonne option. Mais, déplore le secrétaire fédéral à la vie du Parti communiste (dans le Nord), l’échange entre les deux candidats n’aura pas contribué à convaincre.

Sur la forme, le dispositif choisi (la mise en scène), avec les deux pupitres pour les candidats et les journalistes placés plutôt loin, m’a donné l’impression de ne pas fluidifier la communication entre les débatteurs. Les plans de coupe n’ont rien arrangé. Concernant le comportement des deux adversaires, nous avons retrouvé le président que nous connaissons depuis cinq ans. Il se fait vite donneur de leçons mais devant lui, il faut bien voir qu’il y a Marine Le Pen, candidate de l’extrême droite qui montre beaucoup de faiblesse dans ses arguments. Par rapport au débat de 2017, elle semblait plus concentrée. En fait, je l’ai trouvée fébrile et stressée. Je dois dire que je m’attendais à autre chose. Elle était moins agressive qu’il y a cinq ans, mais elle était sur la défensive. Mon sentiment est qu’elle n’a pas beaucoup bousculé Macron. Sur le fond, j’estime qu’il n’y a pas eu de match. Marine Le Pen se présente en candidate anti-système, mais elle est libérale. Résultat, nous avons deux libéraux qui débattent ensemble. Et en matière de libéralisme, Macron est plus fort que Le Pen ! Il démonte d’ailleurs son projet sans difficulté. Sur le pouvoir d’achat par exemple, premier thème abordé dans le débat, la candidate RN dit vouloir augmenter les salaires en diminuant les cotisations patronales. Ce n’est donc pas une réelle augmentation de salaire. Macron, qui propose une prime - et cela ne vaut guère mieux - la coince en lui signifiant que ce n’est pas elle qui établit les bulletins de paie. Autrement dit, il estime qu’elle n’y connaît rien. Même chose concernant la proposition de Marine le Pen sur le taux de TVA à 0 % sur des produits de première nécessité. Il la ramène à ce qu’elle est et souligne que tout le monde, donc même les plus riches, en profiterait. Contrairement au chèque qu’il propose et « qui n’est pas inflationniste ». Il la coince encore en lui rappelant de quelle manière elle vote au Parlement européen (elle se prononce contre les aides pour l’Ukraine) et à l’Assemblée nationale (elle vote contre le blocage des prix de l’énergie). Sur la question de l’interdiction du voile islamique, il la place là encore en difficulté. En fait, Marine Le Pen apparaît sur la réserve même sur les questions qui sont censées être ses points forts. Enfin, concernant le référendum qu’elle défend et qu’elle veut imposer, il la renvoie habilement dans ses vingt-deux et va jusqu’à suggérer que le scrutin du 24 avril fera lui-même office de référendum (entre ses propositions et les siennes). Il oppose la « préférence nationale » et le nationalisme de son adversaire à l’universalisme de la République française. Le problème qui ressort, à l’issue de ce débat, c’est que cette prestation n’est pas de nature à aider les électeurs indécis à utiliser le bulletin Macron contre l’extrême droite. C’est vraiment dommage.