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Grande-Synthe

Un jeune Guinéen menacé d’expulsion

par Patrice VERMEERSCH
Publié le 16 avril 2021 à 16:38 Mise à jour le 23 avril 2021

Grande-Synthe est plus connue pour être la dernière escale avant le soi-disant Eldorado britannique pour des milliers de migrants en transit depuis plus de 15 ans. Aussi l’arrivée sur le territoire d’un jeune qui a fui la Guinée-Conakry à l’âge de 15 ans pourrait paraître anecdotique dans ce contexte migratoire tellement ancré dans la vie locale. Mais ici, le contexte est différent. Car Maya Magassouba, bien intégré dans la ville depuis trois ans grâce à sa volonté de s’insérer, fait l’objet d’une OQTF [1]… appellation technocratique polie signifiant en fait qu’il n’a rien à faire dans notre bon pays. Apprenti grâce à Salem Khalfat, le boulanger qui lui a fait immédiatement confiance, il vit comme tout citoyen : inscrit pour passer son CAP, il est bénévole dans plusieurs associations, et il a surtout noué de solides liens localement avec ses amis et la nouvelle famille qu’il s’est créée dans l’agglomération dunkerquoise grâce à sa compagne.

De nombreux élus, associatifs et anonymes sont venus soutenir Maya Magassouba ce mercredi 14 avril à Grande-Synthe.
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Un soutien total de la population et des associations !

Son employeur ne tarit pas d’éloges à son sujet : « Il est courageux et n’a jamais failli à sa tâche malgré la situation sanitaire difficile. » Et de préciser que ce métier qui impose un lever très matinal n’attire actuellement que très peu de candidats. Maya était présent lors de la manifestation de soutien organisée par de nombreuses associations locales : LDH, MRAP, Attac Flandre, Salam Nord-Pas-de-Calais, Collectif Ripostons, UIL SUD/Solidaires Dunkerque… et les nombreux anonymes et élus parmi lesquels Martial Beyaert, maire (PS) de Grande-Synthe, et Nathalie Benalla-Desmazières, première adjointe (PCF). 22 000 signatures de soutien à Maya Magassouba ont été obtenues à ce jour par le biais d’une pétition, mais rien n’est gagné pour autant. Âgé désormais de 19 ans, le jeune apprenti craint en permanence une reconduction à la frontière. Devenu majeur, sa régularisation est devenue très difficile. C’est ce qui arrive très souvent aux mineurs étrangers isolés qui arrivent sur le territoire français. Seule une annulation de l’OQTF pourrait le rassurer sur un avenir qu’il se construit en France depuis des années.

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Étonnant constat : d’un côté, on propose l’accueil sur le territoire français à des réfugiés qui ne demandent qu’à traverser la Manche… De l’autre, on se retranche derrière des textes permettant (selon la lecture qu’on en fait…) l’expulsion de jeunes déjà bien intégrés. Plus que paradoxal : affligeant ! Dans cette période de Covid-19 où l’on évoque en permanence l’immunité collective, les représentants locaux de la justice et de l’État seraient bien inspirés de s’imposer une « humanité collective » !

Notes :

[1Obligation de quitter le territoire français.