Ph.A
ADECR 59

Les élus communistes et républicains du Nord défendent l’autonomie des collectivités

par Philippe Allienne
Publié le 4 novembre 2022 à 12:16 Mise à jour le 3 novembre 2022

Le 15 octobre, l’Association départementale des élu(e)s communistes et républicains du Nord (Adecr 59) a élu son nouveau bureau exécutif. L’association désormais présidée par Alexandre Basquin a du pain sur la planche. Principale mission : lutter contre la perte d’autonomie des collectivités locales, une conséquence directe des décisions gouvernementales.

« Votre mission, si vous l’acceptez : mettre en œuvre toute votre énergie pour redonner aux collectivités, à commencer par les communes, leur libre administration dans le respect de l’article 72 de la constitution. Le gouvernement bafoue cet article en prenant des décisions qui lui sont contraires. Si vous échouez, les élus locaux ne pourront plus répondre aux besoins des citoyens et citoyennes. » Voilà qui ressemble fort à une mission impossible, ou presque. Mais le nouveau président de l’Adecr, Alexandre Basquin, n’hésite pas à relever le défi. C’est que l’enjeu est fort. Il en sait quelque chose, lui qui est maire d’Avesnes-les-Aubert, une commune d’un peu plus de 3 600 habitants dans le Cambrésis. Pour l’entourer, Delphine Castelli, adjointe au maire de Dunkerque, a été élue secrétaire de l’association. Maxime Viéville, conseiller municipal de Wasquehal, en est le trésorier. Régis Gandaho, conseiller municipal d’Anzin, est secrétaire adjoint. Tous les quatre, élus dans des municipalités de taille diverse, connaissent le même problème : un budget municipal menacé par des réformes qui affectent durablement leur gestion. L’Adecr rassemble 400 élus progressistes dans le Nord. «  Nous nous voulons une équipe rajeunie, renouvelée, dynamique et avec la volonté de défendre les élus locaux, nos collectivités et dans le même temps les habitants de nos territoires. (…) Nous souhaitons être une véritable force de rassemblement des élus progressistes qu’ils soient membres d’une organisation politique ou non, et dès lors qu’ils partagent les valeurs de solidarité, d’égalité, de justice, d’humanisme et d’antiracisme. »

Perte abyssale de la dotation globale de fonctionnement

L’objectif est louable. Mais le contexte imposé aux collectivités est détestable. Voilà, plus de 10 ans que cela dure. Tout a commencé par la suppression de la taxe professionnelle en 2010, rappelle Alexandre Basquin. Aujourd’hui, poursuit-il, « nous sommes malheureusement dans cette même logique puisque le ministre du Budget s’attaque à un impôt de production : la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui rapporte pourtant 7 à 8 milliards d’euros aux collectivités. » Et puis, il faut compter avec la baisse des dotations d’État. « En 2012, poursuit le président de l’Adecr, la Dotation globale de fonctionnement (DGF) s’élevait à 41,4 milliards d’euros. Dix ans plus tard, elle n’est plus que de 26,7 milliards d’euros. La perte des montants versés est abyssale.  » Mais comme si cela ne suffisait pas, l’actualité aggrave encore la situation. La hausse des prix (5,5%, du jamais vu depuis 1985) va faire augmenter les dépenses annuelles de fonctionnement de plus de 5 milliards d’euros. La crise de l’énergie entraîne une hausse des coûts considérables (50% à 200% selon les fournisseurs). « On voit là les effets de la libéralisation du marché de l’énergie que nous avions combattu en son temps  », commente le maire communiste. La liste n’en finit pas. Il y a même ce qui est en principe une bonne nouvelle : l’augmentation du point d’indice de 3,5% des fonctionnaires. Elle est nécessaire pour les agents territoriaux et les élus de l’Anecr s’en réjouissent… sauf que cette mesure a été prise brutalement par la Première ministre, dans un contexte électoral, et n’est pas compensée. Résultat, elle se soldera par une charge supplémentaire de 2,3 milliards d’euros pour les collectivités.

Conséquences pour les services municipaux

Au final, le bilan est catastrophique. Pour pallier ces hausses insoutenables, de nombreuses communes n’ont d’autres solutions que d’augmenter la fiscalité ou les tarifs des services. « À Wasquehal, souligne Maxime Viéville, la maire UDI a été élue sur un programme promettant de diminuer les impôts locaux. Elle ne pourra pas assurer. » À Wasquehal (20 000 habitants), l’augmentation du point d’indice se traduit par une hausse des charges de 400 000 euros, non compensée. Pour une ville comme Avesnes-les-Aubert, cela représente 70 000 euros. Alors, les élus n’auront sans doute d’autre choix que d’augmenter les tarifs des services, voire de réduire l’offre de ces services. Les investissements (écoles comprises) seront également impactés. Certains seront différés, d’autres suspendus. On ne peut pourtant s’attaquer à tout, s’inquiète Delphine Castelli. Dans sa ville, ou à Gravelines, « comment pourrait-on supprimer les illuminations de Noël et les animations de fin d’année alors que cela attire le tourisme ?  » Pourtant, les mesures commencent à être mises en œuvre : baisse des températures dans certains bâtiments municipaux, fermeture de piscine ou de salles de sport, etc. À Valenciennes, le maire a renoncé à fermer les salles de sport. Mais celles-ci ne seront plus chauffées. « Une commune sur deux se trouve face à d’importantes difficultés budgétaires et les premiers à en payer les pots cassés sont malheureusement les habitants eux-mêmes qui souffrent pourtant déjà bien assez », constate Alexandre Basquin. La dernière note de conjoncture sur les finances locales de la Banque postale annonce que les charges à caractère général devraient s’envoler de près de 15%. L’épargne brute des communes devrait reculer de 11,3% et l’encours de la dette ne manquera pas d’augmenter. Face à cette situation, l’Adecr propose un ensemble de mesures fortes qui, pour la plupart, sont partagées par d’autres associations d’élus comme l’Association des maires de France (lire l’encadré). Elle n’exclut pas, par ailleurs, d’interpeller le Conseil constitutionnel pour faire respecter le principe de libre administration des collectivités.

Les propositions de l’Adecr 59
  • Maintien de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
  • Indexation de la DGF sur l’inflation.
  • Retour au tarif réglementé de vente de l’énergie pour toutes les collectivités.
  • Création d’une dotation de soutien suite à la hausse des dépenses de restauration scolaire.
  • Compensation, du coût de l’augmentation du point d’indice.
  • Création d’une taxe exceptionnelle sur les « superprofits » pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 100 millions d’euros.