Le secrétaire départemental du PCF Oise a sa façon bien à lui de décrire la douche écossaise que représente le score de Fabien Roussel. « On ressentait la sympathie et l’intérêt que suscitait sa campagne au fil des semaines. Au final, nous voilà pris dans l’entonnoir du vote utile qui maintenant est consubstantiel à l’élection présidentielle et qui est une machine à broyer le pluralisme en ne conservant que les trois candidats sélectionnés dans les sondages comme étant les mieux placés et qui du coup écrasent les autres. » Ainsi, les électeurs sont-ils conduits à retenir trois noms au premier tour pour sélectionner les représentants des deux blocs dominants qui émergeront.
Sacrée recomposition
Voilà qui, pour le communiste de l’Oise et par ailleurs membre du conseil national du PCF, justifie la contestation des communistes de ce mode de scrutin présidentiel au suffrage universel. « Par sa logique, au fil du temps et depuis qu’il y a ces trois blocs, la situation, s’est aggravée. Depuis que l’extrême droite a la possibilité d’arriver au second tour, cela oblige les deux autres blocs à essayer de n’avoir qu’un représentant de chacun des deux autres blocs. Quand il y avait deux blocs, la gauche et la droite avec une diversité à l’intérieur de chacun d’entre eux, il y avait au premier tour une compétition à l’intérieur de la gauche et une à l’intérieur de la droite pour savoir qui les représenterait. » Avant 2002, la certitude d’un combat gauche/droite était assurée. Ce n’est plus le cas. Quelle que soit la qualité de la campagne menée, si l’on n’apparaît pas comme étant le ou la candidate en capacité de fédérer tout son bloc, à tort ou à raison, on n’est pas sélectionné et on fait un score dérisoire. Pendant 40 ans, le Parti socialiste, qui dominait à gauche, et le RPR et l’UDF, régulièrement alliés et qui ont fusionné pour créer l’UMP devenue LR, ont façonné la vie politique. « Les voilà à présent réduits à rien tandis que l’extrême droite connaît un niveau historique. De son côté, Macron capte complètement la droite libérale. » Parmi les aspects les plus spectaculaires : le ralliement d’Éric Woerth et celui de Caroline Cayeux, maire de Beauvais depuis 20 ans, qui était une des porte-paroles de Fillon en 2017. Édouard Courtial, le président des LR dans l’Oise, appelle à voter pour Macron sur la même base que Sarkozy, c’est-à-dire pas seulement pour faire barrage à Le Pen, mais sur un accord sur la politique qu’il mène. Emmanuel Macron est donc consacré chef de la droite libérale en France. « Sacrée recomposition », commente Thierry Aury.
Paradoxe
En même temps, relève-t-il, « le total des voix de gauche augmente ». Aux voix de Mélenchon, il faut ajouter les 800 000 voix de Fabien Roussel, celles de Jadot et d’Hidalgo. Cela fait un total voix de gauche en progression. Dans l’Oise, c’est 3,5 points en plus qu’en 2017 pour toute la gauche. Par contre, on observe un record de l’extrême droite qui est à 42 % dans l’Oise au lieu de 36,35 % en 2017, et un affaissement fort de la droite et du centre qui perdent 8,8 points.
