RETRAITES

La fausse victoire de Laurent Berger

Jeu de dupes

par Franck Jakubek
Publié le 17 janvier 2020 à 18:05

Un Premier ministre chez Delahousse à 20 h sur France 2 un dimanche soir ce n'est pas comme le matin sur Inter avec Léa Salamé. C'est plus dense. En plus du son, il y a l'image. Et le présentateur qui affiche un air sérieux. L'heure est grave quand même. La CFDT a pourtant décidé qu'ils avaient gagné. Mais quoi ? Rien.

Après le compte rendu de la réunion de vendredi et la suppression, « provisoire », de l'âge pivot, la CFDT et le gouvernement ont multiplié les encouragements à cesser la mobilisation. En vain. Le courrier envoyé aux syndicats par le gouvernement ne trompe personne. Le président et son gouvernement s'entêtent et s'arc-boutent sur leur réforme. Un jusqu’au-boutisme qui commence à porter ses fruits, puisqu'il contribue à renforcer les mobilisations. Même si du côté de ceux mobilisés depuis le 5 décembre, les effets négatifs de la grève commencent à se faire sentir au niveau du portefeuille.

Revenons au 12 janvier, face caméra, Édouard Philippe, plus convaincu que jamais de continuer, compte bien sur l'usure.« Il faut savoir terminer une grève » ose-t-il même. Car pour lui, ceux « qui vont leur dire [aux salariés] d'aller jusqu'au bout, les envoient dans le mur ». Ni plus ni moins. Alors que parmi les mesures gouvernementales de ce début d'année, la rémunération du livret A, principale réserve des salariés en cas de coup dur, va être abaissée à 0,5 %, bien loin de l'augmentation du coût de la vie. Et pendant le même temps, les incitations à utiliser le plan épargne retraite s'intensifie... Il est bien là le nœud du problème. Le peu d'épargne que les salariés peuvent faire tentent l'avidité des rapaces de la finance. Assurances et fonds de pension ont déjà préparé des « produits » d'épargne à disposition du grand public, inquiet de son avenir, et il y a de quoi.

L'ambition du gouvernement serait de ramener le système de retraite à l'équilibre. Et construire un régime universel. Il s'avère que la suppression de l'âge pivot annoncée à grands coups de clairons n'était qu'une mascarade pour permettre à Laurent Berger, leader maximo de la CFDT, de faire rentrer dans le rang les salariés ébaubis par tant d'efficacité. Que les syndiqués de la CFDT, surtout, ne soient pas dupes. Rien n'est gagné dans cette affaire. Pour l'universalité, ce n'est pas encore pour cette fois. La cible s'avère bien la disparition des régimes spéciaux, mauvaise action dont le Premier ministre ne s'est pas empêché de se vanter devant les mêmes caméras de télévision. Mais là aussi, à chaque, fois, des policiers aux avocats, les aménagements se trouvent.

Lire aussi : Partout, la mobilisation sociale se poursuit

Bref, il va falloir continuer. Et en face, la préfecture tente d'étouffer le mouvement. Le préfet du Nord a décidé par arrêté d'interdire à Lille, mardi 14 janvier, le périmètre habituel, le centre-ville, arguant de violences lors de la manifestation du samedi précédent, et de l'impossibilité de définir un autre parcours avec les organisateurs. Mais surtout, pour préserver en théorie le chiffre d'affaires des commerçants pour le 4 ème jour des soldes... La Ligue des droits de l'homme, la CGT et le PCF ont écrit au préfet pour protester.

Il faut espérer pour les commerçants que le projet de réforme n'aboutisse pas, dans ce cas. Sinon, ils seront privés de facto d'une bonne partie de leur clientèle, devenue incapable de dépenser leurs faibles revenus. Mardi, tous les accès au centre-ville étaient effectivement bouclés par un impressionnant dispositif policier. Et jeudi, la police a chargé et embarqué au commissariat un groupe de salariés, d'EDF et de Cargill, au moment de la dispersion de la manifestation place de la République. À l'heure, où nous mettions sous presse, ils n'avaient toujours pas été libérés malgré de multiples interventions.

par Franck Jakubek

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