Relogement

« Nous y sommes, nous y resterons ! »

par Philippe Allienne
Publié le 5 avril 2019 à 16:11

Penchés sur les coupures de presse et documents collectés au fil des mois, les membres du Collectif contre la casse de la tour Kennedy étudient l’évolution du dossier. Ils se réunissent régulièrement dans l’appartement de Marie-France Begard et ne manquent aucune réunion concernant l’avenir de leur tour, de leur totem, comme ils disent.

Le collectif s’est constitué il y a un an avec des locataires qui ont vécu l’essentiel de leur vie dans ces lieux. « Nous avions alors appris le projet de démolition de façon bru-tale, en lisant la presse régionale du 3 mars 2018. L’édition locale de La Voix du Nord révélait que plusieurs immeubles du quartier allaient être détruits, dont la tour Kennedy.Jusque là, nous n’avions perçu que des rumeurs. Rien n’avait été annoncé de manière officielle ».

Devenue présidente du collectif, Marie-France se montre particulièrement vigilante et affiche une attitude ferme. « La maire veut casser le totem. Mais j’habite ici depuis 50 ans. Ils peuvent toujours mettre mes meubles dehors, il est hors de question que je parte. »

Comme Josette Fourmantey, la locataire la plus âgée de la tour, elle a accumulé des dizaines d’années de souvenir. « Si je pars,je meurs », prévient Josette.

Marie-France approuve. « Je suis veuve, tous mes souvenirs sont ici. On n’arrache pas les gens comme cela à leur environne-ment, à leur lieu de vie qui porte leurs moments de bonheur et de tristesse. C’est arrivé à un membre de la famille de mon mari. Moins d’un an plus tard, elle mourrait de désespoir ».

Raymond Bannieu, 69 ans, l’un des plus jeunes du groupe ne dit pas autre chose et exprime son angoisse de perdre ses racines. « Ce qui est abominable, ajoute-t-il, c’est que dans les réunions publiques, avec la maire de Loos, on ne nous écoute pas. Pire, on nous méprise en opposant les jeunes et les vieux. » Selon Marie-France, les membres du collectif « se feraient traiter d’égoïstes parce que nous ne voulons pas laisser la place et parce que nous ne pensons pas à l’avenir des jeunes ! »

Et de se désoler encore lorsque Partenord,leur bailleur social, a fini par accepter le projet de démolition. « Ils ont obtenu l’assurance d’être financés pour mener à bien leurs projets de réhabilitation ».

Autour d’un jus de fruit, Marie-France,Raymond, Francis, Josette, Micheline et Michèle affichent leur détermination et leur révolte en se souvenant que, depuis 20 ans, l’immeuble n’est plus squatté par des zonards, la sécurité est assurée. Non, décidément, ils ne se laisseront pas impression-ner par les promesses de relogement.