Les chroniques de JPM à La Chope

Angélique Gilibert, ancienne adjointe à la culture d’Hellemmes

Publié le 22 février 2021 à 10:12

Quand j’avais demandé la clé de La Chope à Samir, il m’avait demandé : « Tu rencontres encore une artiste ? » « Pas seulement, c’est quelqu’un qui veut les aider, par la politique, par l’action citoyenne. » « C’est bien ça, il en faut », qu’il m’avait répondu. Alors, quand Angélique est rentrée en cette fin de matinée dans le bar fermé, qu’elle a dit « bonjour » à Günther, qu’il lui léchouilla la main, et qu’elle m’a demandé une bière, j’ai d’abord vu une « warrior [1] », une militante de la culture jamais fatiguée. « Je viens de la Somme, d’un petit village à côté de Péronne : une église, un boucher, un bar. Mon père était maçon, ma mère ouvrière dans l’agro-alimentaire, les 3x8, pas beaucoup de vacances. » Après un bac arts plastiques, un Deug, une licence et un Capes, elle voulut alors être professeure d’arts plastiques. J’ai d’abord été stagiaire dans un collège. « Cela n’a pas duré longtemps. J’avais tendance à m’occuper plutôt de ceux qui sont au fond de la classe. On me l’a reproché. Moi qui considérait mon travail comme un moyen d’offrir aux enfants un moyen de s’exprimer, on m’a répondu qu’en sortant du collège, les élèves devaient être des consommateurs de produits culturels. Je m’étais visiblement trompée de voie. » Son premier job, ce fut au FRANCA, comme éducatrice à Lille-Sud. « J’avais mis en place un petit projet d’arts plastiques et de communication. » Angélique venait d’entrer dans le monde de l’éducation populaire. La politique n’a jamais été loin. « J’ai toujours été déléguée de classe, je me suis toujours engagée pour les autres. » Alors qu’elle était au conseil de quartier à Hellemmes, le jour de l’élection de Sarkozy, elle a voulu prendre sa carte au PC. « Ils ne m’ont jamais répondu, alors, j’ai pris ma carte au PS. » Elle travaille alors au conseil général du Nord quand elle est contactée par celui qui sera son modèle durant de nombreuses années. « Jean-Pierre Allossery, alors vice-président de la culture du Nord, m’a contactée pour travailler avec lui. Lui aussi venait de la culture populaire. Il voulait faire de la culture pour tous, travailler en ce sens avec toutes les gauches. Il avait une grande liberté politique. Je suis devenue “son double au féminin”, comme l’avait titré un journal. À cette époque, il voulait augmenter le budget de la culture du Département de 25 %. » Après son élection aux législatives, il propose à Angélique un poste de collaboratrice parlementaire. « Je l’ai donc rejoint à Hazebrouck. » En 2014, Sylvain Petit lui propose de s’occuper de la culture à Hellemmes, jusqu’à ce qu’elle démissionne, il y a peu, de son mandat : « J’ai adoré cette période à Hellemmes, essayer de créer de la culture avec les citoyens dans les quartiers. C’est durant cette période que je me suis remise à peindre. Ma démission a d’abord été pour moi une façon de briser le silence sur le sort des artistes en ce moment. Il faut en parler. Comment réussir à faire comprendre que la culture sauve des vies, que l’éducation artistique fait sublimer la douleur et permet de se reconstruire.  » Elle m’a ensuite parlé de sa passion pour le peintre Pollock, cette émotion qu’elle éprouve devant une toile, pour l’écrivain Milan Kundera, de la bande-son du film Trainspotting et du rock indépendant, pour conclure par cette phrase : « J’aime bien construire autour de l’indépendance. Et surtout, créer un monde plus humain, plus humaniste. » Angélique a caressé le chien, qui lui léchouilla la main et partit sans doute finir un des ses tableaux abstraits et colorés. Go Angelique, go !

Notes :

[1Une guerrière en anglais.