Mort de Manu Dibango

Le globe-trotter du Makossa était aussi avocat des grandes causes

Musique

Publié le 27 mars 2020 à 00:23

Le chanteur, compositeur, saxophoniste et multi-instrumentiste Emmanuel D’Djoké « Manu » Dibango est décédé le 24 mars à l’âge de 86 ans des suites du Covid-19. Né français à Douala, il optera bientôt pour la nationalité camerounais

Tout commence pour lui en 1972 avec son titre « Soul Makossa » sur un album éponyme, inspiré du Makossa, style musical camerounais, mêlé des influences jazz et soul, qui deviendra un immense tube à l’échelle planétaire, notamment aux États-Unis, popularisé par des disc-jockeys qui le diffusent tous les jours à la radio. À l’origine, le morceau est enregistré pour être la face B sur le 45 tours de l’hymne de la Coupe d’Afrique des nations, qui se joue cette année-là au Cameroun. Hélas, dix ans plus tard, un certain Michael Jackson réutilise la phrase d’accroche (« Mamassé Mamassa Mamakossa » et son riff entêtant au saxophone) pour en faire le refrain du premier titre de son album Thriller, pillé ensuite par Rihanna, Jennifer Lopez, les Fugees, Eminem, etc. Tout ça sans l’autorisation (et la mention) de son auteur, Manu Dibango, qui intente alors diverses actions an justice pour faire reconnaître ses droits.

Hébergé à quinze ans en 1949 par une famille d’accueil dans la Sarthe pour faire des études, il décide l’année de son bac de devenir musicien. Il part alors à Bruxelles et tourne en Belgique, avant de s’installer brièvement à Léopoldville (future Kinshasa) et de revenir en France où il collabore avec Dick Rivers, Nino Ferrer (devenant son chef d’orchestre), Mike Brant... tout en continuant à enregistrer des 45 tours. Il triomphe à l’Olympia en 1973, puis est invité plus tard au prestigieux Apollo Theater à Harlem aux cotés des Temptations, il se produit au Madison Square Garden, au Yankee Stadium à New York, croise les as de la soul (Barry White, Aretha Franklin...) et tourne en Amérique latine.

Après avoir fêté dignement son 60e anniversaire, traversé par son légendaire éclat de rire, en enregistrant Wakafrika avec Angélique Kidjo, Papa Wemba, Youssou N’Dour, Salif Keïta et King Sunny Adé, il est nommé artiste de l’Unesco pour la paix en 2004 eu égard à ses multiples combats : lutte contre la faim dans le monde, libéra- tion de Mandela, liberté d’expression, réchauffement climatique, etc.Le 14 mars 2020, iI devait de nouveau fouler la scène du Carnegie Hall pour célébrer les 60 ans de sa « petite soeur », la Béninoise Angélique Kidjo, avant d’être rattrapé par le Coronavirus.