Meilleurs vœux. Partie 2

Publié le 30 avril 2020 à 13:16

Entre réalité et fiction, un lecteur fidèle nous raconte le monde soumis à l’épidémie et au confinement... Voici la deuxième partie de son récit.

Le pays était figé et malgré les discours qui se voulaient lénifiants quant à l’approvisionnement alimentaire qui serait assuré quoi qu’il arrive, les consommateurs n’étaient pas dupes car il devenait évident que si le confinement devait durer trop longtemps, il ne pourrait, malgré la meilleure volonté du monde être maintenu. Conscients de cette impossibilité à venir, ils se ruèrent de plus belle dans les ex-cavernes d’Ali Baba où encore récemment les marchandises diverses abondaient dans les rayons.

Dans le Nord-Pas-de-Calais, la situation paraissait d’autant plus alarmante et dramatique que les « ch’tis » n’auraient plus, comme en 1945, la faculté d’aller s’approvisionner en Belgique notamment pour le tabac, le chocolat et surtout le café, afin de ne plus avoir à boire seulement de l’infecte « chirloute ». À propos du café, gamin, j’étais jeune fraudeur et j’accompagnais ma grand-mère pour apitoyer les douaniers. Comme elle disait, à cause du café, qu’on allait au Brésil, pendant longtemps, j’ai cru que j’étais effectivement allé dans ce pays. Oui, j’ai connu les tickets de rationnement. Et je pense que dans le contexte actuel, on pourrait de nouveau nous les imposer !

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Meilleurs vœux ! Comme tout le monde, dès le premier janvier j’ai présenté mes vœux de bonne et heureuse année et de bonne santé à toutes celles et ceux qui me sont chers ainsi qu’à mes amis et les personnes que j’apprécie tout en souhaitant aussi ardemment, sans malheureusement y croire car la course à l’armement ne cesse de progresser, que la paix règne enfin dans le monde. Nous sommes le 23 mars et compte tenu du malheur qui frappe toute l’humanité, je me demande s’il n’aurait pas mieux valu qu’on se taise car, avant la fin de celle-ci, il nous reste 283 jours. Et tout peut encore nous « tomber sur le dos ».

Certes, chaque chose en son temps. Aujourd’hui, ce qui importe, ce qui est essentiel, vital c’est d’éviter, par le confinement, même s’il est dur à supporter, la propagation de cette créature diabolique en unissant mondialement tous nos efforts en attendant qu’un vaccin ou un traitement efficace non invasif soit trouvé le plus rapidement possible. Avant que l’hystérie collective qui semble affecter l’ensemble de la population ne devienne intolérable ! En effet, maintenant, il faut trouver un ou des coupables, et les hypothèses les plus absurdes circulent. Les animaux domestiques commencent à être pris pour des boucs émissaires et mis à l’index car eux aussi, selon ceux qui ne les aiment pas, véhiculeraient « corona » et autre « Covid-19 » ! Faudra-t-il les euthanasier ? La bêtise humaine en temps ordinaire est déjà sans limites mais lorsqu’il s’agit de survie, panique aidant, elle devient incommensurable. Encore heureux que les habituelles polémiques politiciennes stériles ont cessé d’être, sans quoi je ne vous dis pas ce qui en résulterait !

Indépendamment de nos opinions politiques nous ne pouvons que nous féliciter de cette cohésion apparente de tous les partis qui permet d’éviter les palabres quant à savoir ce qu’il convient de faire ou de ne pas faire.L’important est d’être réactif et d’agir le plus rapidement possible. La priorité des priorités étant de gagner cette « guerre » contre l’ennemi invisible qui nous menace en nous empêchant de vivre normalement. Oui, il convient de réunir toutes nos forces et tout notre savoir médical pour gagner cette guerre contre ces envahisseurs sans visages ! Cependant, la victoire ne pourra être réelle et définitive que lorsque l’activité pourra reprendre progressivement, car cette reprise ne se fera pas sans créer de sérieux problèmes d’intendance qui mettront à mal l’union sacrée si elle devait, comme on peut malheureusement le craindre, être injuste.

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Meilleurs vœux ! Il est peut-être prématuré de penser à la « reconstruction », mais lorsque la victoire sera acquise, il faudra nécessairement procéder aux règlements d’indemnisations diverses dans le cadre des« dommages de guerre » et à la relance de l’économie s’ajoutant aux frais engagés pour obtenir cette victoire. La note sera lourde, très lourde, extrêmement lourde. Et si, pour la régler, sous l’impulsion du président de la République le gouvernement persiste à maintenir sa politique budgétaire précédente pour continuer à favoriser les premiers de cordée, la trêve pourrait être de courte durée et engendrer des désordres calamiteux ou une autre catastrophe : insurrection ou pire, guerre civile !

Il nous reste à espérer qu’au moment venu, la terrible épreuve que nous aurons subie aura permis aux décideurs d’avoir retrouvé le bon sens et la raison. Dans le contexte actuel où il serait impératif que nous retrouvions l’espoir en restant unis, je devrais me garder de jouer à l’oiseau de mauvais augure. Pourtant réaliste, certains faits me laissent à penser que l’impensable peut être redouté, car déjà les « rapaces » habituels anticipent et font entendre leur voix en proposant des mesures à sens unique pour préserver leurs intérêts et leur main-mise sur l’économie. C’est pourquoi il importe que d’ores et déjà toutes les associations de défense des consommateurs et caritatives ainsi que tous les syndicats, et tous ceux qui oeuvrent pour une réelle justice sociale se montrent attentifs et suivent l’évolution de la situation afin de réagir promptement si cela s’avérait nécessaire.

Il serait bon, et je crois que le gouvernement en a conscience, qu’à l’instar du Conseil de la Résistance, toutes les instances publiques participent à un grand forum pour débattre des priorités et du financement des mesures à prendre. Il sera peut-être judicieux pour éviter les désordres d’envisager la dissolution de l’Assemblée nationale pour procéder à des élections législatives anticipées !

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Meilleurs vœux ! Il reste encore de nombreux jours avant la fin de l’année et tout peut encore évoluer. Même si ceux formulés en début d’année ne se sont pas concrétisés, j’oserais quand même en faire un autre : je souhaiterais ardemment que le confinement cesse avant le début de l’été afin que la vie reprenne son cours normal et que les enfants du monde entier puissent de nouveau jouer à l’air libre dans les parcs publics, dans les bois et forêts, en bordure de mer ou dans les montagnes et partout où ils aimaient s’ébattre, rire et chanter. Et que nous retrouvions la joie de vivre ensemble, de créer, de partager nos idées, de serrer franchement nos mains, de nous donner des accolades, de nous étreindre en embrassant toutes celles et ceux qui nous sont chers.Ce serait formidable si pour le 14 juillet, jour de notre fête nationale, nous puissions, comme une apothéose à celle-ci, célébrer en chantant et en dansant sur les places publiques le retour à une vie active normale.

Lulu Berlu