Musique

La belle journée de l’Atelier Lyrique Tourcoing

par PAUL K’ROS
Publié le 29 septembre 2020 à 11:39

Jean-Claude Malgoire aurait été enchanté de cette sarabande musicale à travers la ville que son successeur à la tête de l’Atelier lyrique a déroulée le temps d’une belle journée pour le plus grand plaisir des amoureux de la musique et de l’art lyrique en ouverture d’une saison qui s’annonce riche en couleurs. Il faut dire que François-Xavier Roth, qui ne manque jamais une occasion de saluer l’élan visionnaire du fondateur de l’Atelier lyrique, avait bien fait les choses avec pas moins de cinq concerts, gratuits, ouverts à tous, en divers lieux, malgré et avec les contraintes fort bien respectées de la Covid-19. Il faut dire également qu’il avait invité pour ce faire une pléiade d’artistes de renom, le violoniste Jean-Guihen Queyras, les pianistes Bertrand Chamayou et Jean-François Heisser, le quatuor Manfred, la soprano Salomé Haller, la mezzo Isabelle Druet, l’orchestre La Grande écurie et la chambre du Roy fondé par Malgoire, dirigé par Alexis Kossenko et bien entendu la formation instrumentale « Les Siècles » désormais en résidence à l’Atelier Lyrique. Le public nombreux, heureux de cette grande respiration musicale retrouvée, leur fit fête, y allant même de son couplet pour souhaiter un joyeux anniversaire à la soprano Isabelle Druet ; histoire de rappeler pour l’occasion que chez les gens du Nord, le chant en partage c’est aussi une vieille histoire de famille.

La magie Jean-Guihen Queyras

Nous serions bien en peine de relater par le menu les riches heures de cette journée et n’aurions pas l’espace pour l’écrire. Disons donc simplement que le violoncelliste natif de Montréal Jean-Guihen Queyras nous a fait vivre un moment magique comme il y en a peu avec la suite n°1 pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach, suivie d’une partita du compositeur Turc Ahmet Adnan Saygun, très singulière superposition de couleurs et sonorités d’Orient et d’Occident (passionnante découverte), et pour conclure, la sonate pour violoncelle seul du Hongrois Zoltan Kodaly d’une richesse populaire inouïe exposée par le soliste faisant feu de tous bois et cordes de son instrument, associant avec maestria pizzicato et coups d’archet. Quel programme, quel talent et quelle souriante simplicité !

Enfin, le soir venu, apothéose avec la troisième symphonie « Eroica » de Beethoven. François-Xavier Roth dirige à mains nues son ensemble « Les Siècles », et l’on redécouvre, comme si on l’entendait pour la première fois, cette grande œuvre prométhéenne, révolutionnaire sur le plan musical, pétrie d’humanisme, porteuse des idéaux de la Révolution Française de 1789 encore toute proche et du refus de la tyrannie. Rappelons pour mémoire que Beethoven entreprit la composition de sa troisième symphonie dès octobre 1802 alors qu’il sortait d’une grave crise due aux effets conjugués d’un drame personnel et d’une surdité croissante. Les artistes surmontent les épreuves par leur art créatif et nous procurent heureusement toujours de nouvelles raisons d’espérer !