© Jean-Louis Fernandez
Tenir Debout de Suzanne de Baecke au Théâtre du Nord

Le dessous intime des Miss

par PAUL K’ROS
Publié le 28 octobre 2022 à 11:26 Mise à jour le 6 février 2023

À l’avant-scène une table de maquillage, modèle valise professionnelle, surmontée d’un mirroir négligemment endeuillé d’une écharpe dont l’intriguant logo « Miss retraite » fait allusion à ce qui va se jouer sur les planches comme à ce qui se joue au quotidien dans la vie ; sur le mur du fond quelques chaises alignées pour faire tapisserie et attendre son tour ...Nous sommes au Théâtre du Nord et dans les coulisses de l’élection 2020 de Miss Poitou-Charentes ; c’est Suzanne de Baecque qui nous l’affirme en expliquant le pourquoi et le comment de sa candidature à un tel concours alors qu’elle terminait son cycle de formation de comédienne à l’école du Nord. Objectif : une immersion d’un mois dans le monde réel afin d’en faire un objet de théâtre. Le hasard et l’audace insolite de la jeune comédienne faisant ainsi les choses elle découvre les arcanes de cette compétition singulière, fait connaissance des autres candidates, se lie d’amitié avec certaines d’entre elles, recueille leurs confidences, les ressorts intimes de leur présence à cette compétition particulière, leurs espoirs, leurs angoisses, leurs colères ou leurs détresses. La restitution de ce voyage au cœur des aspirantes Miss Poitou-Charentes (Kiara, Lauraline, Lolita, Chloé, Océane, Clémence etc...) nous dit beaucoup de la société française, mi-rurale, mi-urbaine d’aujourd’hui et donne naissance à un objet théâtral hétéroclite démarrant au quart de tour dans la drôlerie, voire le burlesque pour s’achever solitairement dans la gravité dramatique.Elles seront deux dans l’arène, Suzanne de Baecke, autrice et metteure en scène et étonnante comédienne, longiligne, un peu gauche de prime abord et mal assurée, visage extraordinairement mouvant, toujours sur le fil du rasoir entre subtile connivence et naufrage solitaire ; elle assume, avec une belle cocasserie le « dressage » qui lui est imposé sur la piste de ce cirque de la beauté formatée, jusqu’au sourire permanent entre les dents (tel Démosthène, l’orateur grec qui s’entrainait à parler la bouche pleine de cailloux) .Elle a pour partenaire et coach de concours Raphaëlle Rousseau (également chorégraphe) d’allure athlétique, mètre ruban autour du cou pour les mensurations d’usage et le claquement de fouet à l’occasion.Les deux font la paire avec brio et moult artifices, dont un sèche-cheveux modèle Karcher lubrique qui vaut son pesant de machine à fabriquer du vent comme l’avait fait la bouche d’aération qui soulevait la robe de Marylin Monroe.Suzanne de Baecke, un nom à retenir quelle que soit la façon dont le vent tourne.

  • Tenir Debout, conception, mise en scène et interprétation Suzanne de Baecke. C’étai au théâtre du nord www.theatredunord.fr 03 20 14 24 24