© Margot Dejeux
Les chroniques de JPM à La Chope

Rencontre avec Bernadette Gruson, autrice, metteuse en scène, comédienne et autres….

Publié le 24 mars 2022 à 18:54

C’est elle qui m’avait contacté pour boire un verre à La Chope. J’étais super flatté. Elle m’avait dit « je bois comme toi ». D’un commun accord, on a pris une bière blonde. « Fraîche, il va s’en dire » nous dit Samir. Bernadette est née à Courrières, « mes parents y avaient une boucherie, puis ont travaillé à l’abattoir. Petite, j’allais chercher ma mère au travail. Elle était soit au frigo, soit à la découpe ou à l’emballage. Pour les ouvriers, j’étais “la ch’tiote poulette qui vient chercher sa mère”. À 12 ans, première rébellion, j’étais devenue végétarienne. » L’histoire de Bernadette est dictée par la curiosité et de ne rien laisser passer de ce que la vie lui offre. Devant notre bière, elle me faisait voyager. « Je voulais être danseuse, comme Madonna, mais pour mes parents, c’était le show-biz, la drogue, l’alcool, la dépravation. » Elle s’inscrit alors en biologie. « Je me demandais ce que foutais là. » Une amie lui fait découvrir le théâtre d’improvisation. « Moi qui étais dans une pure reproduction de schéma familial, qui étais dans un rail, sans avoir le choix, l’impro m’a ouvert un champ infini. Si je pouvais improviser sur une scène de théâtre, je pouvais improviser dans ma vie. ». Elle décide de mettre « des océans entre ma famille, ma culture. Je trouve un poste aux États-Unis comme assistante de langue étrangère. C’est le moment charnière de ma vie ». Pause. On sort sur le trottoir : clope, bière, « fraîche il va s’en dire » dit Samir. On profite du soleil. Mais comme la vie de Bernadette, les pauses ne durent jamais longtemps. Un autre voyage. Madrid. Elle a 20 ans, « foisonnement artistique », puis Avignon, prof à l’Institut américain pendant qu’elle prépare une maîtrise des sciences de l’éducation. « J’y découvre l’épistémologie, la socio, Barthes, Simone de Beauvoir. » Diplôme en poche, elle passe six mois en Inde, découvre le yoga puis rentre à Paris, à l’école Samovar, pour être comédienne. Elle y apprend le clown, le geste, le texte jusqu’à ce que « ma vie bifurque. J’ai un enfant. Je dois rentrer dans la vie active ». Ce sera à Lille où elle y rencontre Les clowns de l’espoir et crée sa compagnie, ZAOUM.  Dix créations, textes, installations et performances plus tard, devant La Chope et un verre à la main, nous parlions des Fragments d’un discours amoureux, source de réflexion pour son spectacle Abattoir. « Quand on crée un spectacle, les intuitions nous envoient à un endroit. Ce n’est qu’après que l’on réalise ce que l’on fait. » Elle revenait de trois mois à Montréal où elle avait écrit un texte sur le consentement. Elle m’a parlé de son métier, son écriture, « je m’en sors bien pour une dysorthographique », son « privilège d’être une femme blanche », de la violence des hommes faite aux femmes, mais aussi contre eux-mêmes. « Une de mes obsessions, c’est d’avoir découvert qu’il y a des normes qui se prennent pour des lois alors qu’elles ne le sont pas. » D’être plutôt rebelle que belle, de la difficulté d’être reconnue, soutenue, « un combat perpétuel. Tout les matins, je dois mettre mes gants de boxe ». Elle m’a parlé de tout ça, sous le soleil, me faisant voyager. J’avais trouvé comment finir l’article : « À suivre… »

To tube or not to tube (texte et mise ne scène Bernadette Gruson), c’est à voir le 29 avril à La ferme Dupuich de Mazingarbe, les 3 et 4 mai à la Maison folie Wazemmes de Lille, le 10 mai au Centre culturel François-Mitterand de Tergnier, les 12 et 13 mai à Hénin-Beaumont et le 20 mai à Montreuil-sur-Mer. Pour en savoir plus : ciezaoum.fr.