© Claire Gandanger
Les chroniques de JPM à La Chope

Rencontre avec Claire Audhuy, autrice

Publié le 25 juin 2021 à 12:01

Grosse chaleur en terrasse. « Il a fallu qu’un de tes textes soit mis en scène pour que je te découvre » que je dis à Claire buvant son Perrier citron. Je n’allais pas lui mentir. A ma décharge, elle n’est pas du Nord (ce n’est pas un défaut, il va s’en dire). « Je suis née à Strasbourg et c’est à Colmar que j’ai fait mes études. Je faisais des ateliers de théâtre au collège, au lycée, j’avais des activités musicales au conservatoire. Je fréquentais aussi la Comédie de Colmar. Adolescente, j’ai rencontré Pierre Guillois lors d’un atelier qui durait un an. Il nous a écrit une pièce. Je vivais dans les livres, ma mère était journaliste, mais c’est à cette occasion que je découvrais réellement l’écriture et tous ses possibles. » À 18 ans, elle créait l’association «  Rodéo d’âme  », créant par ce biais un véritable dialogue entre l’art et la mémoire au fil de rencontres artistiques, théâtrales, photographiques ou encore musicales. Le théâtre prenait pour elle de plus en plus d’importance. « On était une bande de copains. Le théâtre était un défouloir. C’est important à l’adolescence de faire quelque chose de ses émotions, de les jouer, de les partager. Le théâtre devrait être obligatoire pour tout le monde ! » L’adolescence est un mot qui revenait souvent dans notre conversation : « Je m’éclate dans les collèges et lycées en ateliers d’écriture. C’est presque ce que je préfère. Je n’ai pas l’impression d’écrire pour les ados. Ce n’est qu’en 2017 que j’ai écrit vraiment pour les enfants sur le sujet de l’exil. Mes deux dernières pièces sont avec des personnages de 13-14 ans. » Puis elle reprend : « Il n’y a pas de sujet que l’on ne peut aborder avec eux. Il faut parler de tout. Il faut leur dire que la peur ne doit pas nous dominer. Si on a peur, on ne peut pas réfléchir. Il faut essayer de l’apprivoiser. La peur de l’autre est grandissante chez les ados. Les attentats, la Covid... ils vivent dans un climat anxiogène. » Je transpirais, mais ne pouvais me détacher des paroles de Claire, parlant de son travail de recherche sur le théâtre de résistance dans les camps de concentration, de son arrière-grand-père, Joseph, qui ne ramena de la Grande Guerre qu’un petit carnet d’aquarelles et un programme de théâtre, comme voulant se rattacher à la poésie pour survivre. « Cela a changé ma vision du monde. » Elle en écrit une pièce qu’elle mit ensuite en scène : La guerre de Joseph. Mais si j’avais voulu rencontrer Claire, c’était pour son travail avec Stéphane Titelein et la compagnie « Franche Connexion ». Installée dans le bassin minier, elle sera présente cette année à Avignon avec le spectacle J’aurais préféré que nous fassions obscurité ensemble, spectacle musical joué et mis en scène par Stéphane Titelein d’après le texte de Claire écrit suite à l’attentat du Bataclan. « J’étais parti pendant quatre mois découvrir le quotidien d’Hénin-Beaumont, qui venait de se déclarer “commune sans migrants”, la mairie a d’ailleurs porté plainte contre moi pour ”artiste non neutre”. J’y ai rencontré Stéphane qui a lu ma pièce et m’a appelée quelques jours plus tard en me disant : “Je suis tombé amoureux de ton texte. En le lisant, j’entends de la musique”.  » Elle semblait heureuse. « C’est une poésie sur le deuil et l’amour. Pour moi, ce texte devait être dit simplement, sans être déclamé. Mais Stéphane l’a sublimé et le porte magnifiquement. » Je demandais à Claire de finir par quelques mots qui lui semblaient essentiels. Sans hésiter, elle me dit : « Chaque homme est mon frère. C’est mon credo, ma philosophie, ma religion. » Je n’avais rien à ajouter.

Plus d’infos : rodeodame.fr. Pour le spectacle : J’aurais préféré que nous fassions obscurité ensemble, du 7 au 31 juillet, à 17 h 45, Présence Pasteur, salle Jacques-Fornier à Avignon. Infos et réservations : francheconnexion.fr.

Message de la compagnie Franche Connexion « Appel à comédien ! La Commune de Paris fut écrasée dans le sang après 63 jours de rêve. Pour vous, qu’est-ce qu’il en reste ? Comment et pourquoi luttez-vous ? On va créer un spectacle sur ce qui nous fait gueuler, pleurer et lutter. Commémorer la Commune, comprendre ce qu’il en reste dans nos tripes et mettre ça sur scène. » Stéphane Titelein Contact : francheconnexion.fr.