L'orchestre Les siècles. DR
À l’Atelier lyrique de Tourcoing

Une myriade d’émotions sans pareille

François-Xavier Roth et Schönberg, Alban Berg, Gustav Maher

par PAUL K’ROS
Publié le 11 novembre 2022 à 15:56 Mise à jour le 6 février 2023

C’est peu dire que François-Xavier Roth, Patricia Petibon et l’orchestre Les Siècles ont galvanisé le public du théâtre Raymond Devos et de l’atelier lyrique de Tourcoing avec un feu d’artifice musical suscitant une myriade d’émotions sans pareille chez les spectateurs lors d’un voyage à travers les œuvres de jeunesse de trois compositeurs Viennois Arnold Schönberg, Alban Berg, et Gustav Mahler. De Schönberg, François Xavier Roth nous a proposé la version pour orchestre à cordes de « La nuit transfigurée », frémissant et combien sensible cheminement nocturne d’un couple dont la femme annonce à son compagnon qu’elle attend un enfant d’un autre et la réponse aimante de celui-ci considérant l’enfant à venir comme sien. Les « sept lieder de jeunesse » composés par Alban Berg de 1905 à 1908 et orchestrés par lui en 1928 sont d’un lyrisme plus difficile d’accès. Fort heureusement la soprano Patricia Petibon, tout< de rose vêtue, une plume d’aigrette glissée dans les tresses orangées de sa chevelure, y déploie toutes les facettes de son agilité vocale accompagnées des ondoiements du corps et d’une gestuelle très expressive.

On voudrait que ça ne s’arrête jamais…

PETIBON © Bernard Martinez

Après l’entracte F.X Roth et son orchestre « les Siècles » en grande formation et en grande forme ont offert au public qui n’en est pas encore revenu la symphonie n°1 de Gustav Mahler. Du grand art. Le compositeur, le chef, les musiciens de l’orchestre nous donnent à voir mieux que si on y était l’éveil de la forêt, le moindre bruissement de la nature, l’alternance insolite d’évènements graves et futiles en passant par une marche funèbre ou une danse de cabaret… Cinquante minutes durant François -Xavier Roth maintient le suspense de ce qui va advenir. L’auditeur-spectateur est aux aguets et à chaque instant surpris, envahi par une profusion de sons et de couleurs, de sensations qui parfois donnent la chair de poule. Nous sommes captivés par la précision du geste, la somptuosité des cordes, l’éclat triomphant des cors debout, les mille subtiles et détonantes interventions des autres cuivres et bois. Cinquante minutes durant lesquelles l’attention et la tension sont telles que même les silences prennent du rythme. Il en ira ainsi jusqu’à la marche finale tumultueuse et triomphale et l’on aurait envie que ça ne s’arrête jamais. Le chef aura toutefois le mot de la fin en rappelant opportunément que les trois œuvres au programme ont été composées au tournant du siècle dernier dans une période qui n’est pas sans rappeler les graves tensions que nous connaissons aujourd’hui et combien la musique est essentielle pour élever l’esprit des humains…