Promue par les pouvoirs publics, l’agroécologie vise à réduire la pression de la production agricole sur l’environnement tout en utilisant au mieux les fonctionnalités des écosystèmes. Cette démarche peut se décliner sous différentes formes, l’agriculture biologique en est une mais d’autres déclinaisons existent (cf encadré). Quel que soit le cahier des charges retenu, l’objectif est d’améliorer les résultats techniques et, à terme, économiques.
L’agriculture biologique plus rentable
France Stratégie [1] a mené une étude comparative sur le bilan environnemental et économique des différents référentiels agroécologiques. Pour les auteurs de ce travail d’analyse (qui s’en tient aux six référentiels regroupant le plus d’agriculteurs), le label AB (agriculture biologique) est celui qui offre le plus de rentabilité pour l’exploitant. Pour accroître le bénéfice, l’accent peut être mis sur la réduction des charges ou l’augmentation du prix de vente. Dans les pratiques agroécologiques, la moindre utilisation d’intrants de synthèse ou leur arrêt va automatiquement réduire leur coût mais il faut compter aussi avec une baisse de rendement et éventuellement une charge supplémentaire liée au désherbage mécanique. « Les exploitations agroécologiques présentent en général des résultats économiques à moyen terme supérieurs à ceux d’exploitations conventionnelles », conclut l’étude (pour éviter de biaiser les résultats, les aides PAC n’ont pas été prises en compte). Mais ces résultats varient suivant le type de pratiques. Ainsi, les exploitations engagées dans la démarche AB sont celles qui présentent le plus souvent une rentabilité nettement supérieure : « Le principal élément expliquant le bénéfice observé est la réduction des charges liées à l’achat et à l’utilisation d’engrais et produits phyto-sanitaires de synthèse, ainsi que les prix de commercialisation des produits bio, plus élevés. » En bovins viande, par exemple, « en 2016 l’excédent brut d’exploitation (EBE) des exploitations conventionnelles était de 3 euros par hectare contre 180 euros en bio ». Malgré la baisse de rendement et la hausse des charges de travail mécanique, les prix de vente supérieurs mais aussi plus stables permettent un meilleur équilibre financier. Les rendements s’avèrent également moins changeants en fonction des années car le système serait « moins dépendant de la conjoncture climatique et moins soumis aux attaques des bioagresseurs ». D’autres pratiques agroécologiques, comme les MAEC [2] systèmes ou le réseau Dephy, sont susceptibles d’apporter une meilleure rentabilité que l’agriculture conventionnelle mais leurs produits n’étant pas identifiables par le consommateur et donc ne bénéficiant pas d’un prix majoré, leurs résultats sont alors dus à une réduction des charges, notamment sur les intrants.
Lier les aides aux services environnementaux rendus
Il reste que ces constatations sont très variables suivant les productions et les régions. Or, le montant des aides ne tient pas forcément compte de ces différences ni des services environnementaux rendus. Ainsi, en agriculture biologique, des productions comme la viticulture ou le maraîchage assurent les bénéfices économiques les plus importants et reçoivent aussi le plus d’aides à l’hectare, notent les auteurs. Il faut cependant préciser, quant aux aides à l’hectare, qu’il s’agit souvent de petites, voire très petites, exploitations. France Stratégie préconise donc de lier davantage les aides et les prix de vente aux services environnementaux rendus, même en dehors de la démarche AB. Cela suppose une meilleure information des consommateurs sur ces pratiques agricoles afin qu’ils acceptent un coût supérieur des produits. Alors qu’en 2017, Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture et premier promoteur des pratiques agroécologiques, souhaitait « qu’une majorité des exploitations françaises soient engagées dans l’agroécologie à horizon 2025 » et que les États généraux de l’alimentation qui se tenaient sous la mandature suivante appelaient de leurs vœux « la conversion d’un tiers des exploitations agricoles à l’AB et d’un tiers à la HVE [3] d’ici à 2030 », la question de la rentabilité de ces démarches conditionne l’atteinte des objectifs politiques.