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Services publics.

Après la mort d’un inspecteur des impôts

Publié le 2 décembre 2022 à 14:17

Au lendemain du meurtre d’un inspecteur des impôts, le 21 novembre, à la suite d’un contrôle fiscal chez un brocanteur de Bullecourt (Pas-de-Calais), des rassemblements et des minutes de silence ont été observés au sein des DGIP.

À Lens, quelques instants avant ce rassemblement, Elisabeth Pastuch et Yannick Massiet, tous deux membres de la commission exécutive des Finances publiques du Pas-de-Calais, ne cachaient pas leur émotion. « Cela, aurait pu être moi, réagit la première, elle-même vérificatrice et contrôleure des impôts.  » Elle connaissait la victime, « une personne très humaine qui ne méritait pas ce qui lui est arrivé. J’ai travaillé huit mois sous ses ordres. » Cet inspecteur s’était rendu au domicile du brocanteur à la demande de la vérificatrice (qui a été ligotée et séquestrée avec son collègue). Cette dernière savait que les contrôles chez cette personne étaient devenus très tendus. Il était cependant impossible de deviner le drame qui allait se dérouler avec en plus le suicide du meurtrier. «  Nous sommes dans l’incompréhension, dit Yannick Massiet. Ludovic était un collègue. Nous le connaissions. Il s’est fait tuer en faisant son travail. » Un contrôle fiscal est une procédure contradictoire avec la personne concernée, explique-t-il. «  En général, cela se passe bien.Il arrive même que des contribuables nous remercient pour les avoir remis dans le droit chemin fiscal. D’une façon générale, nous ne sommes pas stigmatisés par 99% des personnes. Celles-ci ont besoin de contact humain.  » Dans le cas de Bullecourt, les choses ont gravement dérapé et le procureur d’Arras évoque même une préméditation. La séquestration des deux agents, et le spectacle qu’elle a subi ne sera pas sans conséquences psychologiques pour la collègue de l’inspecteur. « Ces faits ne sont pas admissibles », insiste Yannick Massiet. Lui qui travaille au centre de contact de Lens, connaît les violences verbales récurrentes. « Le service Amendes est bien-sûr le plus impacté, dit-il. On nous accuse souvent de nous attaquer aux plus petits et de laisser les grands patrons. Le contexte actuel n’arrange pas les choses. La baisse du pouvoir d’achat, la crise rendent le climat tendu. Cela s’accentue.C’est palpable. Le malaise est profond et touche aussi les autres services publics : pompiers, hospitaliers, etc. Nous sommes des agents de l’État, alors nous pouvons devenir des cibles. » À cela s’ajoute le recul, précisément, des services publics et la baisse des effectifs et des moyens. Si rien ne peut excuser les violences, la manière dont sont traités les services publics ne facilitent pas le travail des agents. « Lorsque je procède au contrôle d’un contribuable au domicile de ce dernier, je m’y rends avec mon propre véhicule, dit Elisabeth Pastuch. On ne met pas de voitures de fonction à notre disposition. » Que faire alors ? Parmi les demandes et propositions transmises à la direction des impôts, elle souhaite que les plaques d’immatriculation personnelles soient rendues anonymes. Elle aimerait aussi que les contrôleurs et contrôleuses puissent se déplacer à plusieurs. Autant de précautions rendues difficiles dans le contexte actuel. Le drame a mis entre parenthèse la campagne électorales pour les élections professionnelles programmées le 8 décembre. Un scrutin pourtant nécessaire aux agents pour une meilleure défense de leurs métiers.