Calais-Turin en moins de vingt heures, trois fois par semaine. C’est la promesse de la nouvelle autoroute ferroviaire, inaugurée le 6 novembre à Calais, qui permet le transport de remorques non accompagnées entre le port du Pas-de-Calais et Orbassano, près de Turin, soit 1150 km. Ce service supporte tous types de remorques (frigo, vrac, matières dangereuses…) et pourra également transporter des conteneurs seuls à partir de janvier 2019.
Deux ans après avoir ouvert la plus longue autoroute ferroviaire européenne entre Calais et Le Boulou (Pyrénées orientales), à la frontière franco-espagnole, Viia complète donc son réseau. Jusqu’à huit trains par jour circulent sur chacune de ses lignes, entre Aiton, près de Chambéry (Savoie) et Orbassano, Bettembourg (Luxembourg) et Le Boulou, et entre Calais et Le Boulou. Le service de ferroutage fait travailler une cinquantaine de dockers sur le terminal multimodal du port du Pas-de-Calais.
« Cette autoroute ferroviaire, c’est un encouragement à poursuivre les efforts du fret ferroviaire », a déclaré Elisabeth Borne, ministre des Transports. Si la part du ferroviaire dans le transport de marchandises a chuté à 9 % en France, « il y a un avenir pour le transport combiné », assure-t-elle. « Pour répondre à l’économie du juste à temps, les transports doivent s’appuyer sur des petits lots et la massification dans les ports ».
Des propos qu’on aurait aimé entendre quelques années plus tôt, par exemple lorsque les cheminots attendaient en vain le soutien des ministres successifs pour défendre l’avenir du triage de Somain, justement axé sur ce qu’on appelle dans le jargon le « wagon isolé ». Parmi les rares soutiens figuraient les élus communistes, tels que l’ancien député Jean-Jacques Candelier, ou son successeur Alain Bruneel.
L’heure serait au changement. La SNCF investit 40 millions d’euros dans des wagons dédiés au transport combiné. « En 2019, les autoroutes ferroviaires représenteront plus de 10 % du tonnage kilomètre du transport ferroviaire de marchandise », avance Guillaume Pépy, président du directoire de la SNCF. « La dynamique est bonne. Les autoroutes ferroviaires, on y croit », ajoute-t-il. « D’ici 2030, les besoins de transport augmenteront de 30 %. Cela représente un enjeu environnemental évident », souligne Elisabeth Borne.
A terme, avec le doublement de la fréquence des rotations entre Calais et Orbassano, l’équivalent de 31 000 calmions seraient ainsi transférés de la route vers le rail, selon Viia. Une goutte d’eau au regard des quelque 4 millions de poids lourds qui transitent chaque année par le port de Calais (2 millions), par le tunnel sous la Manche (1,5 million), ou par le port, tout proche, de Dunkerque (environ 600 000). Pas de quoi doucher toutefois les ambitions du port de Calais, qui se veut le « hub entre l’Europe du nord et du sud », selon son PDG Jean-Marc Puissesseau. Seul port français desservi par des autoroutes ferroviaires, premier de l’Hexagone à être certifié pour sa gestion environnementale (Ecoports), celui-ci mise aussi sur l’importance croissante des enjeux environnementaux dans l’organisation de la chaîne de transport.
Bientôt un Comité interministériel de la mer à Dunkerque
Après plusieurs dispositifs annoncés depuis le printemps (hausse limitée des péages SNCF, soutien au transport combiné, rénovation de lignes…), le gouvernement devrait les compléter par d’autres mesures attendues lors du prochain Comité interministériel de la mer (CIMer), qui se tiendra avant la fin du mois de novembre à Dunkerque.