Lallaing

L’hommage au syndicaliste Thomas Olszanski

Centenaire de l’immigration polonaise (1919-2019)

Publié le 6 décembre 2019 à 12:26 Mise à jour le 7 décembre 2019

Dans le cadre du centième anniversaire de l’immigration polonaise (1919-2019), un hommage a été rendu, ce mercredi 4 décembre 2019, jour de Sainte-Barbe (fête de mineurs), à Thomas Olszanski, syndicaliste polonais expulsé de France en 1934.

Le 17 septembre 1972, à l’occasion du cinquantième anniversaire de l’arrivée massive de travailleurs polonais en France, à l’initiative de la Fédération CGT du sous-sol et de la municipalité conduite par Emile Roger (PCF), une stèle avait été érigée, avenue du général de Gaulle à Lallaing, à la mémoire de Thomas Olszanski. Animée par la Chorale des mineurs polonais de Douai, la cérémonie d’inauguration s’était déroulée en présence de Stanis Walczak, secrétaire de la Fédération nationale du sous-sol de la CGT, Emile Roger, maire de Lallaing, Emile Wazny, membre du conseil national de la Fédération du sous-sol de la CGT, Henri Polakowski, consul général de Pologne à Lille, Henri Bala, secrétaire nationale de France-Pologne, et de représentants du Syndicat des mineurs polonais (Joseph Pocolowczyk, Czeslaw Ciuk). Après avoir rappelé que la Pologne des années 1920 était « soumise à la domination d’une caste au service des puissances d’argent », Emile Roger salua en Thomas Olszanski un « ardent partisan de l’union de combat de tous les travailleurs et de l’amitié franco-polonaise ». Des « liens d’amitié » qu’il s’agissait d’« approfondir », selon Henri Polakowski.

Expulsé parce que communiste

Figure emblématique du syndicalisme polonais, Thomas Olszanski a été expulsé de France en octobre 1934, en raison non seulement de son engagement au service de la classe ouvrière, mais de son attachement à l’URSS, patrie du socialisme. Au nom des amis d’Edward Gierek à l’origine de ce rassemblement soutenu par l’Institut CGT d’histoire sociale du Douaisis, Jacques Kmieciak, historien, a rappelé l’itinéraire de ce militant communiste : « Né en Galicie autrichienne, Thomas Olszanski émigre dans les mines du Nord-Pas-de-Calais avant la Première Guerre mondiale. Après ce conflit, il travaille pour le compte de la Compagnie des mines d’Aniche, à la fosse Saint-René (Guesnain), puis à la fosse Déjardin (Sin-le-Noble). Il s’installe alors à Lallaing. Naturalisé français en 1922, il devient secrétaire de la Fédération unitaire des mineurs de France (CGTU). Il sillonne alors l’Hexagone à l’écoute des revendications des mineurs polonais. Son activisme, son charisme, sa popularité auprès de la main-d’œuvre immigrée, le rend suspect aux yeux de l’État français. Il est accusé de propagande révolutionnaire visant au renversement du régime (sic !). On lui reproche ses écrits dans l’Humanité. La IIIe République procède donc (fait rarissime) à sa dénaturalisation en 1932, puis, en dépit d’une campagne de protestation nationale soutenue par de nombreux intellectuels (Malraux, Nizan), à son expulsion deux ans plus tard. Thomas Olszanski trouve alors refuge en URSS. Il ne gagnera la Pologne qu’en 1945, lorsque ce pays aura tourné le dos à son passé semi-féodal. »

Les foudres de la répression

Puis Louis Bembenek, dirigeant historique de l’Union régionale des syndicats de mineurs (URSM) CGT, rappela toute l’importance de préserver la mémoire des luttes ouvrières en lien avec l’immigration polonaise. C’est dans la mobilisation commune contre le patronat des mines que se consolida le rapprochement entre ouvriers Français et Polonais arrivés en masse dès le début des années 1920, relever la France de ses ruines et relancer la production charbonnière. Ces travailleurs polonais, en s’engageant sur le plan syndical ou politique, s’exposaient aux foudres de la répression patronale ou étatique, à l’instar d’Edward Gierek, futur dirigeant de la Pologne populaire, expulsé en août 1934 suite à la grève de Leforest.

Ou encore d’Emile Wazny licencié des Houillères suite à la grève des mineurs de l’automne 1948, puis permanent du syndicat CGT des mineurs, en charge de la main-d’œuvre polonaise à la Maison syndicale de Lens. « Thomas Olszanski, Edouard Gierek, Emile Wazny ont beaucoup apporté à la classe ouvrière, aux mineurs en particulier. Il est naturel de les honorer à l’occasion de la Sainte-Barbe », souligna Louis Bembenek. Celui-ci appela aussi à s’opposer à la politique de réécriture de l’Histoire engagée par l’extrême droite au pouvoir en Pologne. Le régime prétend expurger de l’espace public toutes références à la Pologne populaire et procède à la démolition systématique des monuments élevés à la gloire des soldats de l’Armée rouge libérateurs de la Pologne.

Une stèle mise en valeur

En présence de Michel Jendraszek, conseiller municipal délégué à la défense et au protocole, représentant le maire Jean-Paul Fontaine (UDI), retenu par d’autres obligations, mais aussi de Thierry Dancoine, maire honoraire (PCF), ou encore de Gérard Fatras, trésorier de la FNACA, des fleurs aux couleurs blanches et rouges de la Pologne ont ensuite été déposées au pied de la stèle. Située au cœur du Square Olszanski, celle-ci est remarquablement mise en valeur par les récents travaux d’aménagement paysager imaginés par la municipalité.