La cokerie, fleuron de l'industrie.
© Mairie de Drocourt
Drocourt

Si la cokerie m’était contée

par JACQUES KMIECIAK
Publié le 4 novembre 2022 à 12:21 Mise à jour le 2 novembre 2022

Jusqu’au 9 novembre, une exposition nous plonge au cœur de l’histoire de la cokerie qui a cessé son activité, il y a vingt ans. Une façon pour la municipalité communiste de rendre hommage « à ces milliers de travailleurs qui ont contribué à la prospérité du pays, en y laissant parfois leur santé et même leur vie  », assure le maire, Bernard Czerwinski.

« La cokerie, c’est la grande oubliée de la casse industrielle. Elle était pourtant connue dans l’Europe entière. C’était notre fierté », indique Bernard Czerwinski. Membre-fondateur de l’Association des anciens cokiers de la cokerie (AACC), Patrick Canivez participera volontiers à cet évènement d’autant plus qu’à l’époque du démantèlement de l’usine en 2003, l’idée de conserver des vestiges de cette aventure industrielle presque centenaire n’avait pas été retenue. Fondée par la Compagnie des mines de Drocourt dans l’entre-deux-guerres, nationalisée à la Libération, la cokerie aurait employé jusqu’à 1 000 salariés à son apogée dans les années 1960. « Il s’agissait de la plus grosse cokerie d’Europe produisant un coke de très haute qualité destiné à l’industrie métallurgique et chimique  », commente-t-il.

Le déclin

Les années 1980, à une époque où les gouvernements successifs privilégient la voie de la désindustrialisation, sonnent le déclin de ce fleuron industriel : baisse de la production, plans sociaux, reclassement du personnel… Devenue en 1990 une filiale de Charbonnages de France, la cokerie obéit plus que jamais à une logique de rentabilité. C’est cet argument que le patronat avance pour justifier la fermeture définitive du site en 2002. « On nous a expliqué que nous n’étions plus rentables par rapport aux Chinois. Or, il y avait moyen de poursuivre l’activité et de préserver plus d’un millier d’emplois (sous-traitants compris) dans le secteur, mais nous n’avons pas été écoutés  », commente, amer, Patrick Canivez alors à la tête de ce combat en sa qualité de délégué CGT. « On nous disait que le coke n’avait plus d’avenir en Europe. Quand je pense que la Pologne vient de se doter d’installations ultra modernes, je suis stupéfait  », s’indigne Bernard Czerwinski. Bénéficiant du soutien indéfectible des élus communistes du secteur et du maire PS d’Hénin-Beaumont, les travailleurs multiplient les actions « coups de poing  » (séquestration du PDG, occupation de l’aéroport de Lesquin, etc.). À défaut d’empêcher la fermeture du site et le démantèlement total de l’usine en 2003, l’intersyndicale évite tout licenciement sec et arrache surtout des clauses honorables de sortie pour l’ensemble des salariés.

Conditions dantesques

La présence d’anciens au vernissage de ce samedi, sera aussi une façon pour eux de marquer leur attachement à leur métier en dépit des conditions dantesques dans lesquelles ils l’exerçaient. «  Nous étions confrontés à des pointes de chaleur insupportables près des fours. Les semelles de nos chaussures de sécurité pouvaient fondre sous son effet. Au contact de matières toxiques, nous n’étions guère épargnés par les maladies professionnelles », confie Patrick Canivez. Et pourtant, bon nombre « auraient volontiers prolongé dix ans encore si cette opportunité leur avait été offerte ».

  • Jusqu’au 9 novembre du lundi au vendredi de 10 à 12h et de 14 à 17h et le samedi de 10 à 13h, au complexe de l’Agora, 184, route d’Arras à Drocourt. Entrée libre. Vernissage le samedi 5 novembre à 11h.