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L’exercice insuffisant du DRH Macron

par Philippe Allienne
Publié le 2 avril 2021 à 10:53

« Nous avons tout fait pour prendre ces décisions le plus tard possible. » Au moins, sur ce point, nous ne contredirons pas Emmanuel Macron. Et encore ! Faut-il bien prendre la dimension de ce « nous » qu’il emploie généreusement et qui ne concerne que le gouvernement et lui-même. La méthode demeure toujours la même : le président cause à 20 heures, le chef du gouvernement s’adresse aux députés le lendemain matin. Ces derniers ne sont pas associés aux décisions. Dépourvu de toute empathie et revêtu de son costume de DRH, comme si la France devait être dirigée et gérée à l’image d’une entreprise, Emmanuel Macron s’est une fois encore affranchi de l’intelligence collective. S’il admet quelques erreurs, il renvoie aussitôt la balle aux Françaises et aux Français en en appelant à leur responsabilité. Il le dit et le répète, il ne fallait pas reconfiner plus tôt, il ne fallait pas toucher aux écoles. Sauf qu’à un moment donné, c’est-à-dire maintenant, il faut bien se rendre à l’évidence. Alors, on ferme les écoles à la veille des vacances de printemps mais rien (autre que ce qui existait) n’est prévu pour la rentrée en termes de conditions d’enseignement. Rien n’est prévu pour empêcher les décrochages scolaires. Ensuite, on demande aux familles de sacrifier encore leurs loisirs, on demande aux parents qui le peuvent de s’occuper de leurs enfants tout en se mettant en mode de télétravail. À aucun moment le chef de l’État n’évoque une quelconque obligation pour les employeurs. Le mot d’ordre est simple : parents, soyez responsables. Même chose en direction des personnels soignants appelés, eux aussi, à faire encore plus d’efforts alors que la politique de santé ne change pas ! On imagine aisément leur état d’esprit au lendemain d’un tel discours. En revanche, Emmanuel Macron, suivi le lendemain par Jean Castex, promet une accélération de la campagne de vaccination en oubliant d’évoquer les retards de fabrication et de livraison des doses. Il se garde surtout d’évoquer la levée des brevets. C’est pourtant le seul moyen de maîtriser la chaîne de fabrication et la bonne distribution des vaccins. Rien n’a été dit non plus sur la nécessité de mettre les vaccins hors de portée des profits et de les rendre disponibles pour tout le monde, par-delà les frontières. Comment est-il possible de combattre une telle pandémie si tous les pays n’ont pas accès aux mêmes droits ? Comment empêcher la circulation des virus mutants si les pays les plus pauvres ne peuvent s’y attaquer ? La septième intervention télévisée du président, depuis un an dans le cadre de la crise sanitaire, ressemble une fois de plus à un exercice de communication. Un exercice très insuffisant pour redonner de l’espoir et sortir le pays du climat anxiogène dans lequel il est plongé.