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Mon droit à être soigné

par Philippe Allienne
Publié le 9 juin 2022 à 23:43

Alors que la nouvelle ministre de la Santé vient d’annoncer, ce 8 juin, de « premières mesures d’urgence » face à la situation catastrophique de l’hôpital public, Martin Hirsch, le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) présentait, le 30 mai sur France Inter, sa vision de la situation. Comme si l’un et l’autre avaient voulu prendre en sandwich la grève des hospitaliers qui s’est déroulée le 7 juin. La réalité du secteur est pourtant connue depuis longtemps et les causes ont été longuement exposées. Les gouvernements successifs de ces 15 dernières années au moins ont tous contribué à affaiblir notre système de santé et à tendre à sa semi-privatisation. Brigitte Bourguignon, dont on connaît la non-action, pour ne pas dire l’indolence lorsqu’elle était chargée de l’Autonomie, a beau jeu aujourd’hui d’affirmer ne pas vouloir « minimiser les difficultés de notre système de santé ». Martin Hirsch n’est pas moins hypocrite quand il admet que « ce que disent les équipes dans les hôpitaux n’est pas surjoué ». Mais quand on lui fait remarquer que 120 hôpitaux, sur le territoire français, sont en très grande difficulté, que les fermetures de lits se poursuivent et que de nombreux services d’urgence fonctionnent au ralenti, il se réfugie derrière une situation internationale. Dans 89 pays, souligne-t-il en s’appuyant sur une récente étude, les deux tiers des médecins et des infirmières sont en burn-out « et ont l’impression de ne plus pouvoir faire leur métier ». Et alors ? sommes-nous tentés de lui répondre. Est-ce une raison pour poursuivre dans cette dérive ? En raison du manque de personnel, 14 à 16 % de lits sont fermés en France. C’est dix fois plus qu’avant le Covid ! Les soignants s’accordent pour dire que les patients « perdent des chances ». Autrement dit, ils risquent de souffrir cruellement ou de mourir faute de personnel. Et ce bon Hirsch n’a d’autre réponse que de s’en prendre aux infirmières intérimaires qui choisissent l’intérim pour gagner plus et travailler quand elles veulent ! Sauf que c’est l’AP-HP qui a créé ce système. Quand un médecin lui rappelle que 41 % de la masse salariale de l’AP-HP médicale est contractuelle et qu’elle-même, après 16 ans d’études, travaille dans ces conditions, en CDD, il lui répond qu’elle peut trouver du travail ailleurs. Que dire des 15 000 salariés suspendus en France pour avoir refusé le vaccin anti-Covid ? « Je défends mon droit à être soigné », était-il inscrit sur une banderole des manifestants, ce 7 juin, à l’hôpital de Roubaix. Au vu des principaux responsables qui gèrent l’hôpital public comme une entreprise, ce droit semble de moins en moins acquis.