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Que tente de tenter Taubira ?

par Philippe Allienne
Publié le 23 décembre 2021 à 19:10

Nous avions failli oublier qu’elle fut le soutien de feu Bernard Tapie. Nous avions failli oublier qu’elle fut candidate PRG à l’élection présidentielle. C’était en 2002 (2,32 % au premier tour et défaite de Jospin). Nous avions failli oublier qu’elle fut balladurienne. Le temps passe, la mémoire citoyenne fait parfois dans l’impasse. Nous n’oublions pas, évidemment, qu’elle fut militante indépendantiste. Nous n’oublions pas qu’elle est à l’origine de la loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité. Elle était alors députée et Éric Zemmour la vouait déjà aux gémonies. Nous n’oublions toujours pas qu’elle fut la garde des Sceaux qui a défendu le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de personnes de même sexe. Une intellectuelle d’une grande éloquence décidément détestable pour Zemmour. Reste que ce dernier fait d’arme date déjà un peu. Christiane Taubira s’était mise en retrait de la vie politique depuis cinq ans. Courtisée par quelques inquiets nostalgiques d’une gauche centriste qui penche nettement à droite (c’est sa vocation), courtisée par les médias dominants qui adorent les nostalgiques à la recherche d’une survivance, Christiane Taubira revient sous les projecteurs. D’abord, elle affirme que non, jamais, elle ne présentera une énième candidature « de gauche » à la présidentielle de 2022. L’affaire est alors entendue. La brillante Christiane ne prendra pas la responsabilité d’une dispersion qui aboutirait au duel tant redouté du second tour entre Macron et Le Pen. Voilà alors que surgit, hors de la réalité, le héros mal masqué. Avec l’entrée en scène du très morveux Zemmour, la donne change puisque, paraît-il, il déstabilise Marine Le Pen. Ainsi, le duel n’est plus d’actualité. Qu’à cela ne tienne, Taubira revient sur sa décision et va décider plus tard, en janvier peut-être, de sa décision. Ce faisant, elle agace beaucoup de monde d’autant qu’elle n’a jusqu’à présent que sa tête - et sa divine aura - à présenter. De programme, point. À part un passif en politique sociale du temps de Hollande, Ayrault et Valls. À part aussi ses prises de position contre la vaccination en Guyane avant d’opérer une remarquable volte-face. Problème : la gestion des horloges façon Mme Taubira apparaît bien contestable. Le pitoyable Zemmour s’essouffle et se fait dépasser, selon les sondages bien sûr, par sa concurrente fasciste. Une fois de plus, à se contenter de commenter des sondages et en oubliant le fond, c’est-à-dire les idées, on se plante. Mais, allons-nous tenter de demander, que tente donc de tenter Taubira ? Elle l’a dit : elle veut raccommoder l’union à gauche afin de n’avoir qu’un candidat (ou une candidate…) contre les méchants. Belle idée. Comme au Chili ? Voilà qui reste à démontrer. La victoire de Gabriel Boric, bien-sûr candidat de la coalition Apruebo Dignidad, a bénéficié de la contribution essentielle du Parti communiste chilien. Cela n’a rien à voir avec une union de circonstance, brinquebalante et de dernière minute qui porte les gènes du renoncement et d’une social-démocratie à la remorque d’un libéralisme mortifère.